Le fort de Souville
Le fort de Souville a été
construit par le général Séré de Rivières
dans les années 1875-1879. Il se trouve à environ 2 km 500
au sud-ouest du fort de Vaux sur un terrain assez exposé (388 m
d'altitude) . De forme peu commune, le fort est équipé de 2 coffres simples à ses 2 extrémités et d'un coffre double sur sa pointe avant. La caserne principale située au centre du fort possède plusieurs pièces reparties sur un rez-de-chaussée et un sous-sol. Elle permet l'accès à un observatoire qui surplombe le fort. Tout autour, sont disposées plusieurs casemates circulaires de 6 m de long sur 1,8 m de large. L'entrée principale (en temps de paix) est située sur la face arrière du fort. Dès 1888, le fort subit
une série de modifications pour le rendre plus résistant.
La maçonnerie est recouverte d'une couche de béton de 2
m 50. De nombreuses galeries sont creusées pour permettre de relier
les différentes casemates et les coffres à la partie centrale. Entre 1890 et 1891, une tourelle est contruite à 100 m environ à l'ouest du fort, munie de 2 canons rotatifs de 155 mm. En 1914, juste après la mobilisation, le fort compte une garnison d'environ 350 hommes, fantassins, artilleurs, pionniers et quelques autres spécialités. Il constitue la " base arrière " des ouvrages et forts qui le précèdent et il est relié par câbles téléphoniques aux forts de Douaumont et de Vaux ainsi qu'à l'ouvrage de Thiaumont. Par le décret du 5
août 1915 préconisant la suppression de l'armement et des
approvisionnements, l'artillerie est retirée mis à part
les 2 canons de 155 mm dont le démontage présente quelques
difficultés.
Plans du fort :
Historique du fort : Dès le début de l'offensive allemande, le 21 février, le fort est régulièrement bombardé avec violence. Après la chute du fort
de Douaumont le 25 février 1916, le fort de Souville devient le
principal point d'observation. Durant les mois qui suivent,
le fort remplit sa mission de base arrière : Le 9 mai 1916, conscient du nombre croissant de population, un ordre strict est donné visant à limiter et réguler les accès et l'occupation au fort. La mise en oeuvre directe de cet ordre est difficile, les troupes évacuées devant trouver un endroit où aller. Entre le 21 avril et le 30 juin, le bombardement perpétuel sur le fort s'intensifie. Une nette augmentation est constatée à partir du 1er juin où environ 1600 obus percutent le fort chaque jour. A partir du 8 juin, viennent s'ajouter des obus à gaz. Le paroxysme est atteint le 22 juin où il est compté environ 2.373 impacts dans la journée.
Soumise à un tel pilonnage et à l'emploi des gaz, la vie dans les souterrains du fort devient pratiquement impossible. Les victimes nombreuses et les dégâts considérables obligent l'évacuation de certaines galeries : beaucoup de casemates sont effondrées ; les cours intérieures sont défoncées, remplies de terre ; les latrines, le réservoir et la pompe à air sont inutilisables ; le mur de soutènement est effondré ; le fossé n'existe pratiquement plus ainsi que le réseau de fil de fer (certains obus y ont formé des cratères de 13 m. de large sur 5 m. de profondeur). Cet acharnement sur la fortification
s'explique par le fait que les Allemands ont pour objectif de prendre
le fort durant le mois de juin. Cependant, la résistance dans le
fort s'organise, des mitrailleuses sont positionnées à chaque
ouverture. . (Voir dans la partie Thémes - Les Grands Hommes de Verdun, la biographie du lieutenant Dupuy)
Le fort de Souville n'a d'ailleurs pas cessé de subir le bombardement allemand, et n'est plus qu'un amoncellement de pierre et de terre. Il n'a plus aucune défense, son réseau de fil de fer n'existe plus, le coffre double est détruit et rares sont les casemates et les pièces de la caserne encore accessibles.
En pénétrant
dans le fort, Dupuy retrouve une garnison très limitée composée
de Térritoriaux, dont le commandant est gravement blessé,
et d'une poigné d'hommes de la 10e compagnie du 7e R.I., sans officiers,
intoxiqués par les gaz, et qui ont eux aussi trouvés refuge
ici. Il prend aussitôt le commandement de tout l'effectif présent
et signale sa position. Quelques temps plus tard,
le coureur Henry Cabrol regagne le fort en compagnie du capitaine Decap
qu'il guide à travers le bombardement très violent. (Voir le partie "Des héros..." concernant Henry Cabrol) Quelles mesures urgentes ordonne le lieutenant Dupuy ? " le lieutenant Dupuy fit d'abord ouvrir et dégager les issues des gaines souterraines et y plaça ses hommes, munis de grenades et prêts à sortir à la moindre alerte. L'issue nord-est de la gaine centrale, notamment, avait été barricadée et complétement obstruée par des sacs à terre et des barbelés. Pendant que des groupes de sentinelles surveillaient les environs du fort, il assigna aux mitrailleurs territoriaux, valides, des postes de combats et leur indiqua leur champ de tir. Il fit ensuite évacuer le plus grand nombre possible de malades et de blessés. "
Toute la nuit, le bombardement est continu et intense sur le fort de Souville. Le 12 juillet à 5 h, il devient inouï. Les Allemands sont bien décidés à reprendre leur marche interrompu la veille. Avant le lever du jour, le 100e R.I. qui
est monté en ligne la veille au sud de la caserne Marceau, doit
prendre place en 1ere ligne entre la Chapelle Sainte-Fine et la Poudrière.
Cependant, le bombardement est tel, qu'il ne parvient pas à atteindre
cette position. A 6 h, des 100e d'Allemands atteignent
la superstructure du fort et l'envahissent. La riposte est immédiate.
Le lieutenant Dupuy s'élance avec une poignée d'hommes et
un vif combat à la grenade s'engage. A 9 h, tous les ennemis ont été
chassés, mais les trous d'obus environnants et les fossés
en sont encore remplis. Le lieutenant Dupuy se précipite
alors au téléphone pour avertir que les Allemands ont été
rejetés et qu'il faut absolument cesser ce tir de destruction.
Cette conversation s'engage alors : Vers 11 h du matin, un peloton du 14e R.I. arrive en renfort au fort de Souville. Peu après, la 4e compagnie du 25e B.C.P. atteint également la fortification. le commandant Cabotte qui la commande met à la disposition de la garnison du fort un peloton et une compagnie de mitrailleuses. Durant toute la journée, le bombardement allemand continue avec une extrême violence mais aucune nouvelle attaque n'est tentée. A 21 h 30, le lieutenant Dupuy et ses hommes,
qui viennent de se couvrir de gloire, sont relevés..
Grace à Dupuy et à ses hommes, le dernier coup est porté à la ruée allemande sur Verdun. L'ennemi n'est pas passé. Il ne s'est jamais trouvé aussi proche de Verdun et il s'en ait fallu de peu que la ligne de française ne soit enfoncée. Aujourd'hui, un monument, un grand lion couché, comme mortellement atteint, symbolise cette extrême limite atteinte par l'armée Allemande.
L'attaque française
du 24 octobre repousse une 1ère fois la ligne de front.
Témoignages sur le fort : Journée du 8 juillet 1916. Témoignage de Jean LOU DE LAS BORJAS, sergent au 7e R.I. : " Nous arrivons à la casemate B du fort de Souville. C'est un abri voûté fait en pierre solide et possédant au-dessus une couche de terre de 5 à 6 mètres d'épaisseur. Là, étaient des malheureux gravement blessés, agonisant même et qui, depuis plus de 6 jours, attendaient leur transport à l'ambulance. Ils n'avaient rien à manger et souffraient terriblement de leurs membres hachés. Ils mouraient tous les uns après les autres. C'était pitoyable de voir ces braves et d'entendre leurs supplications, et cependant, nous ne pouvions les secourir, si ce n'est en leur donnant à manger et surtout à boire. " Journées du 11 et du 12 juillet 1916. Témoignage du lieutenant Dupuy, du commandant Piffre de Vaubon et du capitaine Decap: (lieutenant Dupuy) " Souville, le 11 juillet, 6 heures du matin. Le capitaine Soucarre, intoxiqué, m'a passé le commandement de la compagnie en me donnant l'ordre de me porter aux Carrières. Après avoir franchi de nombreux barrages et des nappes de gaz asphyxiants, nous avons péniblement atteint Souville. Ici, tout est bouleversé. Le commandant du fort est intoxiqué ; la garnison est hors de combat. Sauf ordre contraire, je reste au fort et j'en assure la défense." (commandant Piffre de Vaubon)
"
Souville, le 11 juillet. Toute la fraction utilisable de la 3e compagnie:
35 hommes environ et 3 mitrailleuses servies par quelques territoriaux
encore valides, s'installa à l'issue des souterrains, sur la face
nord-ouest de l'ouvrage. Le lieutenant Dupuy dirigeait cette poignée
d'hommes. Sur la superstructure même, furent placés des groupes
de sentinelles. A l'entrée sud du fort, on mit quelques territoriaux
avec le sous-lieutenant d'Orgemont, de la 3e compagnie. A l'intérieur,
le lieutenant Barreau, revenu à lui, bien que souffrant de son
intoxication, était chargé, assisté par quelques
hommes valides de son peloton, de maintenir l'ordre et d'assurer les communications
entre le fort et le P.C. Tourelle. (capitainne Decap)
"
Le 12 juillet, vers 3 heures du matin, je donnai l'alerte. Le noyau de
la 3e compagnie garnit la superstructure du fort avec les trois mitrailleuses
des territoriaux. Août 1916. Témoignage du commandant P : "
Souville n'a jamais été démoli ; j'y suis allé
en août 1916, et il subsistait encore au milieu des ruines des parties
fort utilisables. Si l'on y avait travaillé depuis la fin de février,
que n'aurait-on fait de ces quatre mois de presque complète tranquillité
intérieure ? Combien de tonnes de béton auraient pu en renforcer
les points utiles ?
Le fort de nos jours : |
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