L'avancée allemande sur la Rive Droite Fin 1915 et jusqu'au 20 février - Etat du front Français, préparatifs Allemands, forces en présence Pourquoi les Allemands ont-ils choisi
d'attaquer à Verdun ? Erich von Falkenhayn
est né le 11 septembre 1861 à Burg Belchau en Pologne. Les raisons qui imposent cette victoire
de l'Allemagne sont les suivantes : Or toutes les hypothèses d'attaque sur le front oriental semblent présenter peu d'intérêt ou trop d'inconvénients ; de plus, l'Angleterre est très dangereuse par sa puissance navale et parce qu'elle instaurera tôt ou tard le service national et pourra jeter dans la bataille des forces neuves, d'où la volonté de décourager cette dernière en saignant à blanc "sa meilleure épée", la France. Ce choix aurait également l'avantage de mettre la Russie (en la privant du soutien occidental) dans l'incapacité de maintenir son effort de guerre. En conséquence, le front français apparaît comme la seule solution. Pour cela, le général Falkenhayn
prévoit une offensive écrasante sur un secteur limité,
afin de ne pas trop dégarnir les autres points. L'objectif territorial
importe peu, il ne s'agit pas d'occuper, mais de tuer. Deux villes offrent cette caractéristique, Belfort et Verdun. Falkenhayn retient finalement Verdun car les forces françaises, acculées à la Meuse qui coupe en 2 le saillant, seront contraintes de se battre le dos au fleuve. Mal reliées à leurs arrières, elles seront comme prises dans une nasse.
Les collines entourant la place de Verdun
offrent des positions idéales pour contrôler le secteur et
bombarder la ville. La présence de forêts profondes et de
bois permet d'acheminer, dans une relative discrétion, hommes et
matériels, notamment en Woëvre. Du reste, d'excellents observatoires
naturels sont déjà aux mains des Allemands : Crête
de Romagne, Jumelles d'Ornes... L'offensive doit permettre de réduire le saillant. C'est de là qu'une attaque française pourrait être déclenchée afin de "rendre intenable le front allemand". De plus, le saillant de Verdun menace les voies de communications allemandes proches d'à peine 20 km et semble présenter "un danger d'une grande importance militaire". L'état-major allemand ne pense pas
devoir redouter une contre-attaque française en raison de la faiblesse
des communications de Verdun avec l'arrière. Les liaisons ferrées
avec Chalons et Nancy sont coupées, de même que la voie reliant
Verdun à Sainte-Menehould, coupée à hauteur d'Aubréville.
Il existe encore l'étroite voie ferrée, mal entretenue,
tracée entre Bar-le-Duc et Verdun : le Meusien. En revanche, les
Allemands disposent de 14 voies ferrées (dont 11 construites par
leur soin), ce qui facilite l'acheminement rapide des soldats et des matériels.
En outre, ils peuvent s'appuyer sur l'arrière-pays industriel de
Moselle, du Luxembourg ainsi que sur les bassins miniers du haut-pays
lorrain.
La place forte de Verdun : En effet, c'est une base offensive : tête de pont de la France sur la Meuse pouvant contrebalancer Metz, alors annexée, et un nud de communication Nord/Sud et Est/Ouest. De 1875 à 1914, une double ceinture fortifiée fut créée autour de Verdun qui apparaissait, à la veille de la guerre, comme la place la plus moderne et la plus puissante de l'Est de la France.
L'état
du front français à Verdun : - Les 1ère lignes ne sont qu'une
suite de tranchées en grande partie éboulées et ne
formant pas une ligne continue. Leurs parapets sont étroits et
leurs créneaux trop espacés. - Les secondes lignes sont un peu mieux réfléchies et dessinées, mais elles sont trop espacées et totalement laissées à l'abandon. Un gros travail est nécessaire pour les remettre en état ;
- En arrière, les villages sont
quant à eux organisés assez logiquement mais insuffisamment.
Les liaisons entre chacun d'eux et vers les lignes de front sont dérisoires.
Le désarmement des forts de Verdun
- le décret du 5 août 1915 : - Comme les forts de Verdun bénéficient d'un puissant armement non utilisé, ils sont les mieux placés pour fournir rapidement une artillerie lourde qui fait défaut pour la grande offensive de Champagne en cours de préparation ; - En raison de la puissance de l'artillerie mobile moderne, les défenses d'une place fixe sont vouées à une destruction certaine. Pourquoi alors laisser des canons se faire détruire ? On prend en exemple les forts de Maubeuge, Liège, Namur, Anvers ; - Le renfort en munition est trop important et trop difficile à réaliser. Surtout si les abords de l'ouvrage fortifié sont tenus par l'ennemi ; - En cas d'invasion, la défense ne peut venir que des fantassins sur le terrain et non du fort lui-même. Une garnison complète n'est donc pas nécessaire. De plus, elle risque tôt ou tard d'être faite prisonnière, d'où la nécessité d'en réduire au maximum l'effectif. Si ces remarques se tiennent sur le papier,
il n'en va pas de même sur te terrain. Tout généraux
imaginant une forte offensive allemande sur Verdun, refuserait catégoriquement
d'appliquer un tel décret. Cependant, en août 1915, le théâtre
des opérations est ailleurs et personne n'imagine un instant une
attaque en ce point du front. Il est intéressant de se demander si les 1er jours de l'offensive auraient été identiques avec les forts en pleine possession de leurs moyens. Et même plus, si le haut commandement allemands, qui était parfaitement au courant de ce décret, aurait choisi Verdun pour sa grande offensive. Le maréchal Pétain, dans ses mémoires, pense que les Allemands, auraient porté leur attaque vers un autre secteur. Nous somme ici dans les hypothèses, mais il est certain qu'occupé, armé et approvisionné normalement, le fort de Douaumont aurait joué son rôle dans les 1ère journées de l'offensive. Il aurait pu répondre efficacement et puissamment aux obus allemands et perturber l'avancer des troupes d'assaut. Et peu être, les décourager
Le commandement français prend
conscience de l'imminence de l'attaque allemande sur Verdun : - Fin 1915, les avions d'observation françaises
remarquent que les réseaux de chemin de fer au nord de Verdun se
font plus dense. En novembre, 3 nouvelles voies apparaissent qui relient
la vois ferrée de la vallée de la Meuse. Permettant ainsi
de rejoindre l'Allemagne par Metz, Thionville ou Luxembourg. - Le 16 janvier 1916, un déserteur allemand du 28e régiment de réserve, recueilli à Béthincourt, signale qu'une importante concentration d'artillerie lourde est en position dans le ravin entre Vilosnes et Haraucourt. Les ordres sont d'économiser les munitions afin de pouvoir assurer un bombardement continu de 100 heures pour les 1er jours de février. - Le 8 février, 2 déserteurs
du 98e régiment de réserve rapportent un témoignage
similaire. Le village de Romagne est devenu une puissante position d'artillerie
de tous calibres (210, 305,380 longue portée, 420). Il arrive de
nouvelles pièces toutes les nuits. Plus près des lignes, d'immenses
abris souterrains (stollens), à plusieurs étages, de 15
m de profondeur, à l'épreuve des bombes, pouvant abriter
chacun 1000 hommes ont été creusés dans le plus grand
secret. Regroupant toutes ces informations, il
ne fait plus de doute au commandement français sur ce que prépare
l'ennemi. En ce qui concerne l'infanterie, des divisions sont tout de même mises en alerte à partir du 11 février. Les 51e et 67e D.I. sont envoyées en renfort en arrière du front (51e rive droite et 67e rive gauche). Les 14e et 37e D.I. sont rattachées à la région fortifiée de Verdun et rapprochées du secteur. La 48e D.I. se dirige sur Chaumont-Sur-Aise et la 16e sur Pierrefitte.
- Le 18e C.A. (112 pièces légères et 110 pièces lourdes) a quitté St Laurent-Sur-Othain ou il cantonnait, et a pris position en face du bois des Caures ; - Le 3e C.A. (96 pièces légères et 213 pièces lourdes) est venu du Rouvois-Sur-Othain et a pris place en face du bois de Ville et de l'Herbebois ; - Le 7e C.A. (100 pièces légères et 100 pièces lourdes) a quitté Damviller pour s'installer en face du village d'Haumont ; - Le 15e C.R. venu de la région de Spincourt a pris position dans la forêt de Gremilly et ses abords ; - Le 4e C.R. est installé sur la rive ouest de la Meuse et le 5e C.R. en Woëvre. A cela, s'ajoute 152 lance-mines. Chacune de ces pièces dispose de 3 jours de munition, soit 3000 coups par batterie de campagne, 2100 par obusier léger et 1200 par obusier lourd (3 autres jours de munitions sont stockés et rapidement disponible en arrière des 1ère lignes). Chacune a déjà ajusté son tir durant les jours précédent, mais avec prudence afin de ne pas éveiller les soupons. Le Kronprinz dirige les opérations depuis son Q.G. à Spincourt. Depuis le 12 février, il est contraint à repousser l'assaut en raison du temps exécrable.
- La 14e D.I. (12 bataillons, 89 pièces légères et 20 pièces lourdes) tient le secteur d'Ornes à la route d'Etain ; - La 51e D.I. (10 bataillons, 70 pièces légères et 20 pièces lourdes) occupe le secteur du bois de Villes-Ornes ; - La 72e D.I. (12 bataillons, 70 pièces légères et 12 pièces lourdes) tient le secteur entre la rivière et la lisière est du bois des Caures ; - Les 29e et 67e D.I. tiennent le secteur de la rive gauche de la Meuse, jusqu'à Avocourt. En seconde ligne, plus au sud, les 3e,
4e et 132e D.I. sont stationnées en Woëvre. En résumé, au 20 février, 34 bataillons français et 270 canons mal appropriés (à tir tendu et étant du matériel assez vieux), vont devoir faire face à 72 batteries allemandes soutenus par 870 canons dont 540 lourds. De plus, le secteur français est mal fortifié, sans boyaux de raccordement, sans abris solides ni liaisons. Le commandement allemand est persuadé d'une percé fulgurante et écrasante. C'est sans compter sur l'âme, la valeur, la courage et la ténacité du soldat Français
21 février - Bombardement
allemand sans précédent puis violent combats au bois des
Caures, au bois d'Haumont, au bois de Ville et à l'Herbebois Soudain, à 7 h 15, un obus déchire le calme du petit jour, puis un second, puis 10, puis 1000... En quelques secondes, les positions françaises,
soit un grand arc de cercle de 12 km au nord de Verdun, deviennent un
véritable enfer. Chaque instant, un obus tombe dans un bruit assourdissant,
faisant trembler le sol et soulevant des vagues énormes de terre.
Tous ce qui est autour est projeté dans les airs, des troncs d'arbres
déchiquetés, des branches, des pierres, des poutres, des
éléments de tranchées, des morceaux de canons et
de fusils, des corps humains en lambeaux. Une épaisse fumé
mélanger à une poussière irrespirable a remplacée
l'air. Témoignage du général NAYRAL De BOURGON : " L'émotion inévitable sous le feu produit chez beaucoup une stupeur où disparaît l'intelligence, où la vue même s'obscurcit par la dilatation des pupilles ; les traits du visage se contractent, les yeux deviennent hagards, l'homme agit par réflexes au milieu d'une sorte de brouillard psychique et même physique où il perd conscience de lui-même " Durant 1 h, le bombardement ne touche que la ligne de front (bois des Caures, bois de Herbebois, bois d'Haumont, bois de Ville, cap de Bonne Espérance), et les positions directement en arrières (bois de la Wavrille, bois de Fosses, bois de Louvemont, massif de d'Hardaumont, villages de Bezonvaux et de Vaux). Mais à 8 h du matin, il s'étend subitement plus en profondeur jusqu'à Avocourt sur la rive gauche et jusqu'aux Paroches sur la rive droite. Les canons de gros calibres battent méthodiquement chaque abris, carrefours, ponts, voies d'accès, le but étant d'empêcher les renforts de pouvoir approcher. Les aviateurs français qui rentrent de mission d'observation rapportent n'avoir vu d'un bout à l'autre du front qu'une large bande de fumé et une ligne de feu ininterrompu au raz du sol, tellement la cadence du tir allemand est intense et que les pièces sont reprochées. Le général Passaga, dans son P.C. au Lac Noir, dans les Vosges, à 160 km, écrit dans son journal : " ...je perçois nettement par le sol de mon abri un roulement de tambour incessant, ponctué de rapides coups de grosse caisse. " Que sait le commandement français ? Pas grand-chose que des obus tombent sur Verdun. Quant aux lieux précis, aux dégâts, aux pertes, aux positions exactes à communiquer à l'artillerie pour tenter un tir de contre barrage ??? Rien en somme Toutes les communication téléphoniques sont coupées et la fumé opaque empêche tout tir à vu. Aucune riposte n'est possible pour le moment. Subitement, à 16 h, le tir s'allonge, 2 millions d'obus sont tombés depuis 7 h 15, soit 3800 par minute. Aussitôt, 8 divisions allemandes, avec de nombreux lance-flamme, sortent de leurs tranchées et s'avancent sur une bande de 6 km. Contrairement aux assauts "habituels", ces hommes en lignes ne courent pas, ils progressent lentement, l'arme à la bretelle pour certain, subjugués par le spectacle qu'ils ont devant les yeux ; les bois n'existent plus, seuls des troncs d'arbres calcinés demeurent verticaux ; la terre labourée fume encore ; d'innombrables cratères immenses parsèment le sol, on dirait qu'une mer de boue agitée c'est subitement figé. La neige tombe lentement sur ce paysage désolé. Les 300 à 1500 m qui séparent les lignes allemandes des lignes françaises, selon les endroits, sont parcourus de ce pas calme.
Ensuite, certaines unités traversent les premières positions françaises sans s'en apercevoir, le terrain est tellement bouleversé qu'aucun détail visuel ne permet de savoir qu'il y avait une tranchée à cet endroit (ni rondins de bois, ni sacs de sable, ni êtres humains). A d'autres endroits, les fantassins allemands.
trouvent des hommes qu'ils croient morts. En faite, ces soldats sont endormis,
leur fatigue nerveuse était telle que lorsque le bombardement s'est
allongé et qu'un calme relatif et survenu, leurs nerfs ont lâché
et ils sont tombés dans un profond sommeil. Ils sont là,
immobiles au milieu des cadavres de leurs camarades. Mais en d'autres endroits, les unités allemandes voient quant à elles, avec stupeur, des hommes se dresser devant elles. Ce sont de véritables loques humaines, titubantes, sourdes, noires de poussière et de boue, les yeux hagards et injectés de sang, à demi-fou. Et ces hommes, lorsqu'ils ne sont pas blessés, dans un réflexe de désespoir, trouvent la force de chercher et de réarmer un fusil, de mettre une mitrailleuse en batterie, de tirer et de lancer des grenades. Sur les 12 km de front, ce même scénario
se reproduit. A la lisière nord du bois de Caures, au bois d'Haumont,
au bois de Ville, à l'Herbebois, des soldats français trouvent
la volonté de se défende, retrouve leur devoir de soldat
et ouvrent le feu sur les lignes allemandes qui s'avancent vers eux. Au bois des Caures, tenu par les 56e et
59e B.C.P. commandés par le colonel Driant, 300 à 400 hommes
sont encore en vie sur un effectif de 1300. Le jeune lieutenant Robin,
commandant la 9e compagnie, parvient à tenir durant plusieurs heures,
avec une poignet d'homme, un minuscule ouvrage à demi effondré.
Lorsque les Allemands sont parvenu à encercler l'ouvrage et arrivent
de 3 directions en même temps, l'affrontement se poursuit au corps
à corps. A la lisière du même bois,
les survivants de la 7e compagnie, aux ordres du capitaine Seguin, repoussent
successivement 4 assauts. La nuit tombe sous la neige et les combats
désespérés se poursuivent. Le bombardement qui déchaîne
à présent les secondes lignes empêche tout renfort
de porter secours. Les pertes françaises ont été cruelles, les hommes du 30e corps se sont battus non à 1 contre 3, mais à 1 contre 10 et parfois à 1 contre 20.
22 février - Perte
du village d'Haumont, du bois des Caures, du bois de Brabant, du bois
de Ville et du bois en E A 4 h 40, le bombardement allemands. reprend de l'intensité. A 7 h 30, armé de lance-flammes, l'ennemi attaque la partie sud du bois de Brabant, tenue par le 351e. En peu de temps, le bois est perdu.
Les lance-flammes (Accessible également dans la partie Thèmes) Le pilonnage allemands qui
sévit se fait particulièrement intense sur le village d'Haumont.
De quart d'heure en quart d'heure, les ruines changent d'aspect, s'enfonçant
dans la terre. A 9 h, c'est le bois en E qui tombe. Sur ce point du front, l'ennemi est stoppé devant le bois de Samogneux (324e R.I.) A 11 h, le bois de Ville tenu par le 233e R.I. est perdu. Le régiment se replie sur le bois de Wavrille. L'ennemi est stoppé sur le centre de la Wavrille (233e et 310e R.I.). Au bois des Caures, le bombardement est
également assez violent toute la matinée. Les chasseurs
de Driant, en entendant les points de départ des obus, savent qu'ils
sont lancés de 3 directions à la fois, signifiant que le
bois est pratiquement encerclé. La seule issus désormais
et de se replier par le bois de Fays et le village de Beaumont. Mais cette
retraite n'est pas encore envisagée. En début d'après-midi,
le lieutenant Robin et ses hommes sont fait prisonniers. Ils se sont battu
jusqu'aux limites de leurs forces. Emile Driant est né
le 11 septembre 1855 à Neufchâtel-sur-Aisne (Picardie) dans
une famille bourgeoise. Son père est notaire et juge de paix. A 17 h, le bois des Caures
est perdu mais la résistance française a été
sévère. 110 chasseurs rentreront sur 1200. "
Descendirent seuls, ce 22 février au soir, du bois des Caures en
petites fractions qui se rassemblèrent peu à peu à
Vaucheville : A 15 h, le bombardement a cessé
de nouveau sur le village d'Haumont et à 16 h, les troupes allemandes
sont parties à l'assaut de 3 côtés à la fois.
A 23 h, l'ennemi est bloqué au bois
des Caures et ne peut continuer sa progression.
Durant cette journée, les Allemands
ont souvent cru trouver face à eux des troupes fraîches,
tellement la riposte était énergique. Cependant, très
peu de renforts, ordonné la nuit précédente par le
général Chrétien depuis sont Q.G. de Souilly, sont
parvenus à leur position, le bombardement allemand étant
trop violent.
23 février - Perte
de la Wavrille Brabant, tenu par les restes d'un bataillon
du 351e R.I., est en flamme. A 1 h moins le quart, craignant l'encerclement,
le général Bapst signe un ordre stipulant le repli de ce
bataillon sur le village de Samogeux, 3 km au sud. Cette manuvre
s'exécute entre 3 h et 6 h par une nuit glacées. Au sud-ouest du bois des Caures, 4 assauts allemands sur le bois le Fays sont successivement repoussés par les 60e, 165e et 365e R.I. et le 56e B.C.P. A la fin de la journée, le bois le Fays est toujours aux mains des Français.
A la Wavrille, l'ennemi attaque en force et parvient à contourner la 1ère ligne française. Toutes les unités en ligne du 327e R.I. sont capturées. Les éléments du 243e (3 bataillons) qui s'y trouvent doivent se replier en direction du bois des Fosses. La Wavrille est perdue. A l'est de la Wavrille, de 11 h 30 à la nuit, la lutte est acharnée sur l'Herbebois. A 16 h, le lieutenant-colonel Hepp ordonne le repli sur le bois des Chaumes des éléments qui s'y trouvent (164e, 243e et 327e R.I.) Enfin, le village de Ornes, à gauche de l'Herbebois, est soumis toute la journée à la pression allemande. Le soir, la lisière nord du village est tenue par l'ennemi, mais le centre résiste toujours. Toute la journée, le bombardement
allemand a été très fort sur tous les secteurs et
les combats très violents. De nombreux blessés, sans soins
depuis 2 jours pour certains, agonisent dans le froid.
Depuis le 21 février,
la ville de Verdun est sans cesse bombardée. Les habitants se sont
réfugiés dans les caves ou dans la citadelle. Les mères
serrent entre leurs bras leurs enfants apeurés.
D'un
coté de la route, ces gens partent vers l'inconnu sous la neige
en abandonnant leur foyer, le visage triste et le coeur en peine. Ils
poussent des charrettes de toutes sortes chargées de tout ce qu'ils
ont pu emmener, des tas hétéroclites embarqués dans
la précipitation, la cohue et l'angoisse du lendemain. En entrant dans Verdun déserté, bombardé, en feu, beaucoup ne se doute pas que dans quelques jours, lorsqu'ils redescendront des 1ère lignes sain et sauf, cette ville sera pour eux comme un paradis.
24
février - Samogneux est encerclé puis perdu - Perte des
villages de Beaumont et de Ornes, du bois des Fosses - Violent
combat sur la cote 344 Dès 1 h du matin, le bombardement
s'intensifie sur Samogneux, déjà pratiquement intenable.
S'ajoute le pilonnage en gros calibre (155 mm) des canons du fort de Vacherauville
qui est mal renseigné et croit le village aux mains de l'ennemi. A 9 h 45, malgré le bombardement allemand très intense, 2 bataillons de la 51e D.I. se portent à l'assaut du massif de la Wavrille mais ne peuvent l'atteindre. Vers midi, d'un bout à l'autre du front qui ne fait maintenant plus 8 km de large, le tir allemand s'allonge et les troupes équipées de lances flamme, s'élancent vers l'avant. Celles qui sont maître de Samogneux
poursuivre leur marche en direction de la cote 344 précédée
par un gigantesque barrage roulant. Rapidement, les débris de 2 bataillons du 35e R.I. sont rassemblés et reçoivent l'ordre de contre-attaquer la cote 344. En gravissant les pentes de la colline, les pertes sont très lourdes, mais 180 hommes environs parviennent à atteindre le sommet. Toute l'après-midi, des combats sporadiques ont lieux et le soir, les Allemands sont repoussés. Les positions reprises sont très précaires, il n'y a plus de vivre et de munition, mais les ordres sont de rester sur place à tout prix. Plus à l'est, Beaumont est tenu par les 208e et 327e et le bois des Chaumes est tenu par le 243e R.I. Attaqués de toutes parts, les Français doivent se replier sur Louvemont. Le bois des Fosses qui depuis la matin est soumis à un bombardement par obus lacrymogènes, est intenable. Les Français doivent se replier et abandonner le bois à l'ennemi.
Au bois le Fays, les unités françaises (débris des 60e, 365e et 35e R.I.) sont maintenant isolées mais luttent toujours. De nombreuses batteries françaises,
en ligne depuis 3 jours, cessent le combat et se replient vers l'arrière,
arrivées à bout de force et de munition. Le village de Ornes, qui subit des attaques incessantes depuis plusieurs heures, tient toujours. Cependant, à 17 h 30, l'ennemi parvient à réaliser une percée et se déploie sur la route d'Ornes aux Chambrettes. A 19 h, les unités françaises se voyant serrées de 3 côtés, évacuent le village et rallient Bezonvaux. Dès lors, le village de Ornes est perdu. Au bois le Fays, les 60e et 365e R.I. atteignent le bout de leurs forces. A 19 h, ils décident de se replier sur la cote du Poivre. Au soir, le village de Louvement tient toujours (156e et 273e R.I.). Il tiendra toute la nuit.
Depuis 16 h et toute la nuit qui suit,
des renforts arrivent enfin et forment du mieux qu'ils le peuvent une
ligne d'arrêt entre Louvemont et la cote 347. Témoignage du général
Pétain :
" D'abord en camion-auto par la route Souilly-Verdun, pied à
pied par petites colonnes utilisant tous les itinéraires qui, du
nord de la place, s'élèvent vers Saint-Michel et Souville,
les éléments prélevés sur les deux divisions
de réserves générale se rapprochaient des lignes. Témoignage du caporal MARQUOT du 156e R.I.: " Partis de Charmes, nous avons marché toute une journée et toute une nuit et nous sommes arrivés à la côte du Poivre le 25 février au début du jour. On nous avait dit : "Nous ne savons pas où est l'ennemi, allez de l'avant jusqu'à ce que vous le rencontriez et là, fortifiez-vous sur place.""
Dans la nuit du 24 au 25 février, la situation française est donc tragique. Du coté allemand, l'infanterie se fortifie sur les positions conquises, alors que derrière elle, l'artillerie qui ralentie ses tirs durant la nuit, vient occuper de nouvelles positions conquises plus au sud, lui permettant au matin de reprendre sont tir infernal plus en profondeur dans les lignes françaises. Cette journée est sans doute la
plus désastreuse de toute la bataille de Verdun. L'ennemi a gagné
sur les Hauts-de-Meuse, presque autant de terrain qu'au cours des 3 jours
précédents. Le général de Langle de Cary,
commandant le groupe des armées du centre dont reléve le
30e corps d'armée, est informé continuellement de la gravité
de la situation. Après hésitation, il ordonne l'abandon
des positions de la Woëvre mais en revanche, de tenir coûte
que coûte sur la rive droite face au nord entre Meuse et Woëvre.
Pour cela, il engage immédiatement le 20ème corps dans la
bataille. Il faut, quoi qu'il en coûte, sauver Verdun dont la chute
représenterait une grave atteinte morale, mais aussi une perte
de prestige face aux Alliés. Pour clore ces 4 journées d'intenses
combats, voici le témoignage de Marcel LELONG, jeune médecin
auxiliaire de 24 ans au 164 R.I.
25 février - Perte du
fort de Douaumont - Le général Pétain prend
le commandement de la région de Verdun Le fort de Douaumont est en effet devenu
un objectif essentiel pour le commandement allemand, et il compte mettre
tout en uvre pour le conquérir. Il représente un refuge
sûr au milieu du champs de bataille ; un abri parfait pour stocker
des munitions, reposer les troupes, soigner les blessés les plus
urgents et mettre les autres à l'abris avant leur évacuation
; un point d'appui important et stratégique pour la poursuite du
mouvement en direction de Verdun.
Dés 8 h, le bombardement allemand
reprend donc très violemment. Sur plusieurs points du front, l'artillerie
française, mal renseignée, tire sur ses positions. Au village de Louvemont, le pilonnage est démesuré. Etre maître de Louvement ouvre l'accès à la côte du Poivre. Et qui tient la côte du Poivre, peut aborder le fort de Douaumont par l'ouest, qui se trouve à 800 m à droite. L'état major allemand l'a bien compris. Selon le processus habituel, le bombardement s'allonge plusieurs fois dans la matinée pour permettre aux troupes d'assaut de s'élancer. A Louvemont, elles sont accueillies par
des coups de fusils. Elles se replis et le bombardement reprend aussitôt. A midi, nouvelle attaque entre Louvemont et la cote 347. L'ennemi parvient à prendre pied dans quelques maisons du village, défendu par le 85e R.I. Mais il doit rapidement les évacuer devant la force du tir français. Le bombardement reprend jusqu'à la côte du Poivre. Vers 13 h, le 85e R.I. a atteint ses limites.
Le colonel Theuriet qui commande les restes du régiment décide
dans un suprême élan, de réaliser une charge à
la baïonnette. La situation est si tragique qu'il n'y a plus rien
à perdre. Lorsque les Allemands voient s'avancer les Français
face à eux, ils croient tout abord qu'ils se rendent. Mais bientôt,
alors que les dernières cartouches françaises sont tirées,
ils répliquent à la mitrailleuse. En peu de temps, les 2
bataillons du 85e n'existe plus. A 14 h, une nouvelle attaque allemande devant la cote de Talou ne donne pas de résultats. A 15 h, l'ennemi a investi le village de Louvemont. Aussitôt, il poursuit vers la côte du Poivre en lançant plusieurs attaque simultanés sur la ligne Louvemont - bois de la Vauche. A 16 h, il s'est emparé des tranchées autour de la route de Louvemont, du village de Ornes et de la cote 378. Il n'est arrêté qu'au ravin de la carrière d'Haudraumont. Plus à l'est, entre la cote 378 et Bezonvaux (au bois Hassoule), l'ennemi surprend le 208e R.I. et en capture une grande partie, ainsi que les restes du 2e B.C.P. Les hommes qui sont parvenus à reculer, se replient en désordre vers l'arrière.
Perte du fort de Douaumont (Voir
également la partie "Fortifications", "Le fort de
Douaumont") : Alors, électrisée par cette déroute française, Brandis décide avec quelques hommes de s'avancer vers le fort. La petite troupe arrive sans encombre au réseau de barbelés, ouvre une brèche à la cisaille, descende dans le fossé à l'aide d'un tronc d'arbre.
Puis, voyant les tourelles du fort vide de défenseurs, qu'aucun coup de feu ne part de la tranchée de tir du rempart, les soldats gravissent la superstructure de l'édifice. Le seul danger vient des percutants allemands, la fumée est si dense que l'artillerie ne voit pas les fusées demandant l'allongement du tir.
Peu de temps après,
les hommes y pénètrent par plusieurs entrées et courent
bientôt dans les couloirs sombres. En débouchant dans la
cour centrale, ils tombent nez à nez avec une 50e de Territoriaux,
sans armes et complètement ébahis. Les territoriaux sont
aussitôt fait prisonnier.
Pour comprendre comment un tel événement a pu se produire, il est important d'apporter quelques précisions : 1 - Le front de Verdun se trouvait à
plusieurs kilomètres au nord du fort de Douaumont, et il n'avait
pas bougé depuis plus de 18 mois. De plus, comme nous l'avons vu
au chapitre " Le désarmement des forts de Verdun ", en
haut de cette page, la garnison du fort avait été supprimée
et ses approvisionnements réduits. Ceci explique qu'il n'y ait
eu qu'un si petit nombre d'homme dans le fort le 25 février à
17 h. 2 - L'avance allemande ayant été
si importante et si subite depuis le 21, les occupants du fort n'étaient
pas du tout au courant de la proximité de l'ennemi. Dans la tumulte
de ces 4 derniers jours, personne au commandement français n'a
pensé, pris le temps ou même jugé bon de les en avertir.
Aucun préparatif défensif n'a donc été fait
en prévision de l'arrivée des Allemands. Témoignage du général
ROUQUEROL :
" La nuit n'était pas encore tombée sur les plateaux
glacées de la rive droite de la Meuse, le 25 février 1916,
que la nouvelle de la prise du fort de Douaumont se propageait en traînée
de poudre parmi les troupes allemandes massées dans le voisinage
pour une attaque devenu inutile. Le fort de Douaumont
A 18 h, le fort de Douaumont est tombé mais le village de Douaumont tient toujours. Les combats y sont très violents. Les troupes françaises ont été chassées de la côte du Poivre et des hauteurs d'Haudromont.
A 18 h 30, sur ordre du général Balfourier qui craint l'encerclement, toute la 37e D.I. (2e et 3e zouaves, 2e et 3e tirailleurs) se replie sur Froideterre et Belleville, sur les dernières hauteurs au nord de Verdun, à 3 km de la Ville. A 22 h, la 39e D.I. commence à relever la 37e avec l'ordre de tenir coûte que coûte. Elle prend position devant le village de Bras. La 51e D.I. tient quant à elle les positions entre le village de Douaumont et le fort de Vaux. La nuit met un terme aux attaques allemandes,
mais le bombardement reprend. A ce moment, avec la journée du 24 ou les pertes de terrain ont été énorme, ou la retraite a été importante et que le fort de Douaumont est tombé, le moral de l'armée française est ont plus bas. Le désastre de la perte de Verdun est pressenti par tous
Prise de pouvoir du général
Pétain : Philippe
Henri Benoni Omer Joseph Pétain est né
le 24 avril 1856 à Cauchy-la-Tour (Pas-de-Calais) dans une famille
modeste. Lorsqu'éclate la guerre, il a 58 ans, il est devenu colonel et s'apprêteà prendre sa retraite. Cependant, il prend la tête d'une brigade d'infanterie et après s'y être distingué, notamment en Belgique, il est promu général de brigade. Plus tard, il est nommé général de corps d'armée et remporte de brillants succès dans les batailles de l'Artois. Il se distingue, en particulier, par sa prudence et le souci qu'il témoigneà épargner la vie de ses hommes.
Dés 8 h du matin ce 25 février,
Pétain se présente à Chantilly devant le général
en chef. Lui et son état major doivent très rapidement se
mettre en route vers Bar-le-Duc et s'installer dans le quartier général
qui se trouve dans la mairie de Souilly, petit village sur la route entre
Bar-le-Duc et Verdun. Témoignage du général
Pétain :
" A 11 heures du soir, dès mon retour à Souilly, le
général de Castelnau transcrivait mon ordre de mission sur
une feuille de son calepin de poche, la détachait et me la passait
" pour exécution immédiate ".
26 février - Lutte
pour le village de Douaumont - Perte de la côte de Talou et du Poivre
- La situation parvient néanmoins à se stabiliser Avant l'aube, les Allemands lancent une nouvelle attaque sur côte de Talou et cette fois-ci, parvienne chasser les unités françaises qui reflue vers l'arrière. La côte est prise. Dans la matinée, le général de Castelnau, mal informé, croit que les Allemands n'ont pas encore eu le temps de s'installer dans le fort de Douaumont. Il donne l'ordre d'attaquer et de reprendre l'ouvrage. Cependant, le fort a été puissamment occupé durant la nuit et son armement a été remis en état de tirer. Nos vagues d'assaut viennent se briser les unes derrière les autres. En fin de matinée, l'attaque allemande
reprend d'un bout à l'autre des 10 km de front, de la côte
du Poivre à gauche jusqu'au bois d'Hardaumont à droite. A l'extrême gauche, les unités françaises qui occupent encore une partie de la côte du Poivre sont soumises à de violent assauts répétés. Très affaiblies par le bombardement du matin, elles sont incapables de refouler les troupes allemandes. Témoignage
de Frédéric GERMAIN, caporal au 146e R.I. :
"
Combien de temps dura ce bombardement en bas de la côte du Poivre
? Pour moi, il dura des années. Nous étions isolés
; plus de liaison ni de ravitaillement puisque tout autour de nous était
bouleversé, la terre retournée, les arbres pulvérisés. A droite, sur la ligne Haudraumont-village de Douaumont, le 1er bataillon du 85e R.I. s'étale sur 2 km. Il est réduit de moitié depuis la veille et sans soutient d'artillerie. Le combat qu'il livre est terrible. L'ennemi, beaucoup plus nombreux tente désespérément de le contourner. L'ouvrage de Louvemont est perdu mais la ligne tient. Plus à droite, sur les pentes au sud de la ferme d'Haudraumont, les Allemands se heurtent aux 8e et 110e R.I. Après plusieurs tentatives sanglantes, ils sont stoppés. Encore plus à droite, les ruines
du village de Douaumont sont toujours tenues par le 3e bataillon du 95e
R.I. Plus une maison n'a de toit, se sont plus de 1000 pièces d'artillerie
qui se sont acharnées sur le village toute la nuit. Plus tard, vers 14 h, l'aile gauche du
95e R.I. flanche et l'ennemi parvient à occuper quelques maisons
du village. Il ne peut cependant pas poursuivre. Le 95e R.I. sera relevé à la nuit par les 8e et 110e R.I. qui prendront sa place dans la village. Il aura perdu 800 hommes. Plus à droite du fort de Douaumont, à l'est du village, l'ennemi a face à lui le 418e R.I. Il est également maintenu sur ces positions initiales. Enfin, à l'extrême droite, une avancé est réalisées au bois d'Hardaumont. L'ouvrage du même nom tombe aux mains de l'ennemi. Ce dernier est néanmoins stoppé à la lisière du bois par le bombardement français. Finalement, le centre du dispositif, s'étalant
de la côte du Poivre exclus jusqu'au bois d'Hardaumont exclu est
en partie maintenu. Seules les 2 ailes ont été forcés
mais l'avancée à été contenue. En ce qui concerne les pertes françaises du 21 au 26, l'ensemble de la région de Verdun a perdu 25.000 hommes environ.
Il est très important à ce
stade du récit, afin de ne pas tomber dans la monotonie par la
suite, de bien garder à l'esprit les conditions de combat et l'état
dans lequel se trouvent maintenant les soldats de premières lignes. Du côté allemand, bien que
la supériorité numérique et l'action offensive soient
incontestables depuis le début de la bataille, les pertes ont été
importantes. La résistance française bien que longue à
se mettre en place a été acharnée.
Du coté français, les difficultés
sont les mêmes mais multipliées. Témoignage
de C. CORNEVIN, soldat au 160e R.I. :
"
La nuit, cependant, un blessé se révèle parmi
tous ces morts. Il appelle, il réclame à boire. Nous lui
donnons le peu d'eau boueuse que nous trouvons. Nous voulons le transporter
au poste de secours, mais le moindre mouvement lui arrache des cris de
douleur ; les brancardiers appelés le laisseront là. Rien
à faire ! Nous couvrons de couvertures ses jambes brisées,
tout son misérable corps, nous relevons sa tête et, la mort
dans l'âme, le laissons en proie au délire. Nous revenons
apaiser sa soif de temps en temps.
27 février
- Lutte pour le village de Douaumont Pendant la nuit, le bombardement allemand est continu. Au matin, il devient plus violent sur le front de Bras - Douaumont, et s'étend jusqu'aux forts de Souville et de Tavannes, au village de Belleville et Verdun. A 8 h, le général Guillaumat prend le commandement du secteur allant de la Meuse au village de Douaumont exclu. A 16 h, les Allemands attaquent de chaque
côté du fort de Douaumont. A gauche, ils se heurtent aux
8e et 110e R.I. dans le village de Douaumont et devant le bois d'Haudraumont
et ne parviennent pas à percer. A droite, à l'est du village de Douaumont, ils se retrouvent de nouveau face au 418e R.I. et sont également stoppés.
28
février - Lutte pour le village de Douaumont Sur le reste du front, le bombardement
allemand est assez violent toute la nuit et toute la matinée. Rapidement, chaque poste de secours est
tellement bondé, qu'il est difficile aux médecins de mettre
un genou au sol pour déshabiller ou soigner un blessé.
Témoignage de X : " Notre poste de secours regorge de blessés. Nous faisons des pansements sans discontinuer et nous disons par signes ce que nous avons à dire : impossible de placer un mot ; on ne peut même pas s'entendre. Je soigne ceux qui sont étendus sur leur brancard, devant le poste de secours devenu beaucoup trop petit pour les recevoir tous. Un malheureux à qui j'essaie de garrotter la fémorale est blessé d'un éclat profond dans la poitrine pendant que je le panse. Un tout jeune caporal m'arrive, tout seul, avec les deux mains arrachées au ras des poignets. Il regarde ses deux moignons rouges et horribles avec des yeux exorbités. Je tâche de trouver un mot qui le console et lui crie : "Que fais-tu dans le civil ? "j'ai alors la réponse navrante qui me serre le cur et m'empêche de rien ajouter : "Sculpteur", dit-il ! " Témoignage de Gaston
GRAS : "
A la tombée de la nuit, des voix lugubres se font entendre : "
Brancardier !... Brancardier !... " appellent longuement des hommes
disséminés dans les entonnoirs. ... (Au début de la guerre, dans
chaque régiment, les gradés avaient l'habitude de désigner
les futurs brancardiers parmi des hommes qui n'estimaient pas capable
de se battre. Cependant, ils se rendirent vite compte que s'était
l'inverse qu'il fallait faire. En effet, les brancardiers, à la
recherche de blessés entres les lignes, agissaient de manière
autonome et en dehors de tout contrôle. Leur rendement était
entièrement dépendant de leur sens du devoir, leur dévouement,
leur résistance physique et morale, leur courage
Leur
besogne se continuera toute la nuit : toute la nuit, à la faveur
de l'obscurité, ils recueilleront les blessés transportables,
ceux que l'on à quelques chances de sauver en les soignant à
temps. Dans les longs couloirs étroits qui précédent les abris, les blessés s'entassent; claquent des dents, pâlis par les hémorragies, grelottant de fièvre. Pas un gémissement, mais un lourd silence où chacun évalue ses misères et ses chances d'en revenir. Parfois, l'un d'entre eux plus valide, pouvant encore marcher, s'en va vers l'arrière, nanti d'une fiche de carton rouge passée dans la boutonnière de sa capote. Pour celui-ci, le problème reste tout entier : il ne faut pas se faire prendre dans la barrage en descendant vers l'arrière, vers les petite autos sanitaires qui l'emporteront loin de la ligne de feu.
... ( Ensuite, dans les
hôpitaux de campagne, les blessés sont pris en charge mais,
il n'y a quasiment rien pour déchoquer les malades. On ne peut
que les réchauffer avec des rampes de lampes électriques. Malheureusement, les brancardiers des bataillons, du régiments, de la division même, ne sauraient suffire au dégagement du champ de bataille : un blessé exige au moins deux hommes pour le transporter sur un brancard, et les brancardiers ont eux aussi été décimés pendant l'attaque qu'ils ont suivie comme les autres. " A 15 h, l'ennemi attaque le calvaire de Douaumont et les abords du fort (73e et 110e R.I.). Il est repoussé et laisse sur le terrain de nombreux cadavres. A 16 h, nouvelle tentative d'attaque. Des corps à corps locaux s'engagent mais globalement, l'ennemi est de nouveau renvoyé dans ses lignes. Il ne parvient qu'à enlever un élément de tranchée qui était tenu par des unités du 110e.
Sur les pentes sud de la ferme d'Haudraumont (8e R.I.) et à droite (418e R.I.), le combat se poursuit et se prolonge tard dans la nuit. |