Rive droite :

La grande offensive française débutée le 20 octobre a permis de reprendre une partie importante du champ de bataille et de s'y installer solidement : le village de Douaumont, le fort de Douaumont (24 octobre), le bois de la Caillette, la région nord de l'étang de Vaux, le bois Fumin, le plateau du ford de Vaux et le fort lui même (3 novembre).
Cependant, tout les ravins permettant d'accéder à ces positions sont encore aux mains de l'ennemi : le ravin du Helly entre le bois du Chauffour et le bois Albain, le ravin de Hassoulé entre le bois Hassoulé et le bois de La Vauche, le " Fond-du-Loup " entre le bois de Hardaumont et le bois Hassoulé, le ravin des Houyers au sud du bois d'Hardaumont.
De plus, l'ennemi possède encore tous les points d'observations du secteur tel que la cote 378, la cote 347 et la cote 380.


Front début novembre 1916

 

Il est maintenant impératif pour les Français, afin de renforcer encore plus solidement le secteur reconquis, de s'emparer de ces voies d'accès et de ces observatoires.

Une nouvelle offensive est donc prévue par le général Pétain et le général Nivelle, et confiée au général Mangin.
Témoignage du général Pétain : " Le général Mangin, ce jour-là, se conformant à mes instructions et à celles du général Nivelle prescrivant de reconquérir les positions de couverture de la ligne des forts, lançait au nord de Douaumont quatre divisions appuyées par quatre autres divisions en deuxième ligne et par 740 canons. Nous avions cette fois la supériorité numérique devant les quatre à cinq divisions que pouvait seulement nous opposer la Ve armée allemande dans le secteur d'attaque, et notre artillerie, plus encore qu'au 24 octobre, dominait la situation. "

Mangin prévoit un assaut sur un très large front, comme l'a été l'offensive d'octobre, soit un front de 10 km. Il doit s'étendre à gauche, du village de Vacherauville (qu'il faudra reconquérir), jusqu'à la région du fort de Vaux, à l'extrême droite.
Les objectifs sont ambitieux : les villages de Vacherauville, de Louvemont, de Bezonvaux, la cote du Poivre, les cote 342, 378, 347, les bois des Caurettes, Chanfour, de la Vauche, Hassoule d'Hardaumont, la lisière du bois le Chaume, les ouvrages d'Hardaumont et de Bezonvaux.

Pour mener à bien son plan, Mangin dispose de 5 divisions constituées de troupes d'élite, dont 2 ayant déjà participées à l'offensive d'octobre :
A gauche, la 126e D.I.(général Muteau) (55e, 112e, 173e et 255e R.I.) aura pour mission de reprendre la village de Vacherauville et la cote du Poivre ;

Au centre, la 38e D.I. (général Guyot de Salins) (8e Tirailleur, 4e Zouave, 4e Mixte Z.T. et R.I.C.M.) aura pour but d'atteindre la cote 342 et la cote 378, au nord-est de la cote du Poivre, et de reconqérir le village de Louvemont ;

La droite qui représente le front le plus étalé sera constitué de 3 divisions.
La 37e D.I.(général Garnier du Plessis) (2e et 3e zouaves et 2e et 3e tirailleurs) devra progresser et aller reprendre le bois de la Vauche ;

La 133e D.I. (général Passaga) (32e, 102e, 116e et 107e B.C.P., 401e R.T., 321e R.I.) et la 22 e D.I. (général Mordrelle) (19e, 62e, 116e et 118e R.I.), en étroite liason, devront passer la cote 347, le bois d'Hardaumont, le bois Hassoulé, le bois des Caurrières et reprendre l'ouvrage et le village de Bezonvaux

En plus des divisions d'attaque, le dispositif est renforcé par 4 divisions de soutient :
La 6e D.I. (général Pont) (5e, 24e, 28e, 119e R.I.)
La 128e D.I. (général Riberpray) (100e, 167e, 168e et 169e R.I.)
La 113e D.I. et la ? D.I.

Comme pour l'offensive d'octobre, les difficultés sont grandes. Le terrain à reprendre est très large, très diversifié et très vallonné :
- De grands plateaux ou les Allemands ont eu le loisir d'approfondir les tranchées, de les renforcer par une seconde et une troisième ligne, de creuser de profonds et solide abris, de déployer d'épais réseaux de fils de fer, de disséminer des nids de mitrailleuses à des positions stratégiques ;
- De profonds ravins qu'ils ont garnis, sur les revers de pentes, afin qu'ils ne puissent pas être atteint par les obus, de grands campements, de dépôts de minutions, d'aérodromes.

Pour que l'opération ait une chance de réussir, d'importants préparatifs doivent être menés avec la même précision et la même minutie que les travaux entrepris en septembre.
Cependant, ci l'état du terrain était déjà pitoyable en septembre, il est loin de s'être amélioré en raison des pluies abondantes de novembre
C'est dans des conditions insupportables déjà développées le mois précédent, dans la boue gorgée de cadavre, sous la pluie, la neige et le bombardement allemand, que se déroulent les travaux de ré-empierrage des routes et chemins (plus de 30 km) ; reconstruction des voies ferrées étroites, plus de 10 km ; aménagement des positions de batterie près des lignes puis acheminement des batteries elles même ; approfondissement et fortification des tranchées, des parallèles de départ, des abris, des postes de commandement ; rétablissement des liaisons téléphoniques ; réapprovisionnement des abris, des fort de Douaumont et de Vaux, en vivres, eau, matériels, armements, munitions, obus ; etc.

Les préparatifs s'achèvent sous un temps exécrable, qui ne permet pas le déclanchement de l'offensive. Mais tous les régiments qui doivent y participer sont prêts et cantonnent déjà dans les villages autour de Verdun. Le froid est rude et fait souffrir les hommes, et chacun attend l'ordre qui déclenchera le départ vers les premières lignes.

Le 10 décembre, le temps semble s'éclaircir…

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11 décembre
Le général Mangin prend la décision de lancer la préparation d'artillerie.

Les aviateurs et les aérostiers décollent pour mener à bien leur mission cruciale de repérage et de réglage. Les données sont aussitôt transmises à l'artillerie qui met au point ses plans de tirs. La préparation d'artillerie peut débuter…

Des 100e de sections d'artillerie, en attente depuis plusieurs jours, rejoignent leurs emplacements, mettent leurs pièces en batterie et commence le pilonnage des secteurs qui leurs ont été attitrées.

Avec la même puissance et la même précision que pour l'attaque du 24 octobre, 740 canons de tous calibres pilonnent sans relâche les lignes ennemies. Les obus à gaz sont employés massivement. Vacherauville, Louvemont, Bezonvaux, les ouvrages d'Hardaumont et de Bezonvaux, les batteries, les tranchées, les réseaux de fil de fer, les redoutes, les abris, les voies d'accès, sont écrasés sous le bombardement d'une violence inouï.


Destruction de voie ferrée

Toutes les Divisions d'Infanterie sont mises en alerte. Les paquetages sont faits et les hommes se rapprochent du front en camoin.
Ordre du jour de la 6e D.I., commandée par le général PONT : " Officiers, sous-officiers et soldats de la 6e DI, Vous êtes appelés à combattre à nouveau sur le terrain de vos anciennes luttes.
En vous portant en ligne vous franchirez les ravins, vous traverserez les bois que vous avez vaillamment défendus à deux reprises, puis vous les dépasserez.
C'est que l'ennemi, dont votre résistance avait brisé les furieuses attaques a dû subir les terribles effets de nos gros canons et soutenir le choc de glorieux camarades. Moins tenace que vous, il a reculé devant leur élan superbe perdant en quelques heures le fruit de pénibles efforts.
Vous trouverez, vous aussi, l'occasion de le culbuter et vous vous montrerez aussi hardis dans l'attaque que vous avez été fermes dans la défense.
Vous ajouterez, vous aussi une gloire nouvelle aux drapeaux de vos régiments et vous couronnerez l'œuvre commencée par vous au début d'Avril dans la bataille pour la garde de Verdun, l'immortelle cité. "


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Du 12 au 14 décembre
La
préparation d'artillerie française dure pendant 4 jours, causant d'importants dégâts dans les lignes allemandes. Beaucoup de soldats abandonnent leur positions et viennent se porter prisonniers dans les lignes françaises. Pendant ce temps, les régiments français gagnent les premières lignes et s'installent dans les parallèles de départ.

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15 décembre
Après une nuit glacée de pluie et de neige fondue, le ciel s'éclaircie soudain et la visibilité devient excellente, l'heure H est fixée à 10 h du matin...

A 9 h 50, le barrage roulant s'allonge brusquement. A 10 h précise, les fantassins français sortent de leurs tranchées et s'élancent au pas de charge. La progression s'avère difficile et très épuisante en raison du barda que doivent porter les hommes, et de la boue épaisse et collante qui occupe tous les secteurs. Beaucoup s'enlisent profondément et ne peuvent poursuivre la progression.

Quelles sont les forces allemandes que les Français vont trouver face à eux ? Un nombre équivalent de divisions en première ligne, soit 5 D.I., la 10e, la 14e et la 39e division d'infanterie, la 14° et la 39e division de réserve. En seconde et 3e ligne, 4 autres divisions prêtes à intervenir, la 3e et la 5e division d'infanterie, la 21e division de réserve et la division d'ersatz de la Garde. Cependant, l'effectif de ces 9 divisions est réduit, et elles arrivent du front de la Somme ou elle ont combattues durement. Les hommes sont épuisés et veulent " du calme "


Voici en détail, les unes après les autres, toutes les actions menées :

L'extrême gauche du dispositif est tenue par la 126e D.I. (55e, 112e, 173e et 255e R.I.).
Les 600 m qui s'éparent les régiments des lignes ennemies sont franchis au pas de charge, malgré l'état détrempé du terrain.
La surprise et telle que les Allemands n'émettent aucune résistance et se rendent aussitôt. Ils ne sont pas très nombreux en raison des fortes désertions survenues les jours précédents.
A gauche, le village Vacherauville est occupé et nettoyé en moins de 15 minutes. Les troupes se fortifient en avant du village.
A droite, la cote du Poivre est gravie sans rencontrer plus de résistance. Sur le plateau, la progression se poursuit. En 30 minutes, l'ensemble du Poivre et repris, à l'exception d'une poche ou se manifeste une résistance plus accrue. Les assaillants se concentrent sur ce point qui ne tarde pas à se rendre.
Les objectifs sont éteints.

 

Le centre est tenu par la 38e D.I. (8e Tirailleur, 4e Zouave, 4e Mixte Z.T. et R.I.C.M.)
A l'heure H, les sifflets retentissent et tous les régiments sortent d'un même élan de leurs tranchées, baïonnettes en avant.
Une forte résistance est de suite manifestée dans le ravin Heurias, entre la cote du Poivre et le bois d'Haudromont. A cet endroit, un camp ennemi est installé avec d'importantes fortifications et cavernes bétonnées. Contrairement à la 126e D.I., la pénible ascension du ravin a totalement anéanti l'effet de surprise et les mitrailleuses allemandes arrosent d'un feu nourri les vagues qui montent vers elles.

L'attaque qui s'engage est très violente et meurtrière. Mais finalement, les Français parviennent à assiéger la position en faisant de nombreux prisonniers et en capturant un important matériel.
La progression peut enfin se poursuivre. Les cotes 342 et 378, à l'est/nord-est est de la cote du Poivre sont reprises et fortifiées sur place. Plus au nord, le village de Louvemont est repris et même dépassé.
C'est une totale réussite, mais les combats pour reprendre ces secteurs ont été très violents et meurtries pour la 38e D.I.

 

La droite qui représente le secteur le plus étalé, est tenue par 3 divisions : la 37e D.I. (2e et 3e zouaves et 2e et 3e tirailleurs), la 133e D.I. (32e, 102e, 116e et 107e B.C.P., 401e R.T., 321e R.I.) et la 22 e D.I. (19e, 62e, 116e et 118e R.I.).

A 9 h 50, les régiments de la 37e DI s'élancent mais sont rapidement stoppés sur leur gauche par une forte résistance allemande. Durant une heure, le combat est très violent. Finalement, la poche de résistance fini par tomber, la progression reprend.
La lisière du bois de la Vauche est atteinte, et une légère progression parvient a être réalisé dans le bois. Les objectifs sont pratiquement atteints.
Témoignage du lieutenant-colonel de SAINT-MAURICE, du 2e tirailleurs : " A 9h50, le 1e bataillon du 2e régiment de tirailleurs sortait de la tranchée de départ, à gauche de l'église de Douaumont. A peine la première vague avait-elle escaladé les gradins de franchissement que l'on entendait le " tac-tac " de la " machine à secouer les capotes " : cinq mitrailleuses, nichées dans l'église du village, claquaient à toute volée.
Les grenadiers, qui marchaient en tête avec les sapeurs, se précipitent, broient les servants sur leurs pièces à coups de grenades; puis, continuant à descendre les pentes criblées de trous de marmites, encombrées de morceaux de fils de fer où s'empêtrent les jambes, d'éclats de bois, de rondins brisés, arrivent jusqu'au ravin du Helly.
Les boches y avaient organisé de vastes abris, à dix mètres sous terre, où aurait pu tenir un régiment; mais notre préparation d'artillerie avait endommagé les organisations superficielles.
Les tranchées sont bouleversées : plus de banquettes ; plus de parapets ; c'est un amoncellement de terres déchiquetées, de piquets arrachés; on ne saurait distinguer les pare-éclats des éléments de tir; il faut sauter d'éboulement en éboulement.
Grâce, toutefois, à la solidité des abris, les garnisaires valides étaient encore nombreux.
Devant les assaillants, la fusillade crépite, les grenades explosent; et, à mesure que l'on progresse, la résistance devient plus âpre, les destructions étant plus incomplètes.
Il faut, par endroits, avoir recours aux lance-flammes pour réduire tel ou tel abri.

A 11 heures, la majeure partie du ravin était entre nos mains. Seul, un élément de tranchée continuait à résister.
Y tenait encore le colonel von Kaisenberg commandant le 6e grenadiers ennemi, entouré de son état-major : un major, deux capitaines, un lieutenant et trois médecins.
Ils avaient dressé un barrage de sacs à terre et de rondins, et mis en batterie une mitrailleuse que le colonel servait lui-même. Ce n'est qu'après une résistance acharnée, et lorsque le colonel fut tombé sous nos balles, que la vaillante petite troupe consentit à se rendre et que les tirailleurs eurent la totalité de la position en leur pouvoir.
Il leur fallait encore conquérir deux kilomètres de terrain pour atteindre la ligne des Chambrettes qui leur était assignée comme objectif; deux kilomètres d'un terrain effroyable, raviné, chaotique, où l'ennemi avait accumulé les travaux; où il fallait demeurer trois jours et trois nuits, sous la pluie, les rafales de neige, dans la boue, et où l'on couchait avec, pour seule protection, une toile de tente. "

 

Sur la gauche de la 37e D.I., la 133e s'élance à l'heure prescrite en direction du village de Bezonvaux.


Le village de Bezonvaux

Les régiments gravissent les pentes de la cote 347 et la reprenne. Ils abordent ensuite le bois d'Hardaumont ou ils parviennent à reconquérir les ouvrages de Lorient. Ils sont ensuite stoppés à la lisière du bois Hassoulé et des Caurrières, et devant le village de Bezonvaux d'ou part un feu nourri. Les hommes s'enterrent sur place.
A la nuit tombé, l'ordre est de poursuivre coûte que coûte la progression.
Témoignage du colonel PICARD, du 321e R.I. : " A minuit, l'ordre arrivait de prendre par surprise, dans la nuit même, la tranchée des deux-Ponts et le village de Bezonvaux. Les difficultés étaient énormes : nuit opaque et neige abondante, troupes dispersées par le combat, connaissance à peu près nulle de la résistance ennemie. On me parlait d'envoyer deux compagnies ; on ne les eût jamais revues. Je téléphonai qu'il fallait au moins deux bataillons et j'organisai un groupement avec mon 6e bataillon et la 102e Chasseurs, sous le commandement du commandant Gatinet, du 6e bataillon.
A la réception de l'ordre, Gatinet me faisait dire que c'était absolument impossible et je crois bien qu'il avait raison. Mais il n'était plus temps de discuter : si nous laissions l'ennemi se reprendre, c'était l'opération manquée et peut-être un repli d'une profondeur incalculable.
Aussi, j'écrivais à Gatinet : " L'honneur militaire est engagé : vous êtes responsable de l'exécution ; à quelque prix que ce soit, il faut attaquer cette nuit ; il est 2 heures, je vous donne jusqu'à 5 heures, mais c'est l'extrême limite ; vous m'en répondrez personnellement. "
Suivai le détail du coup de main, dont je vous fait grâce. Quelle nuit d'angoisse !
Gatinet, qui était un brave, dit à ses officiers :
" C'est une absurdité, mais à la guerre, l'absurdité réussit quelquefois ; allons-y ! "
Pourquoi le Fritz, cette nuit même, évacua-t-il le camp de Hambourg et le village de Bezonvaux ? Nous ne le sauront jamais. Quoi qu'il en soit, cette opération de nuit qui était la témérité même, l'audace la plus folle, s'exécuta avec des difficultés inouïs, mais réussit.
La transmission des ordres avait pu se faire à travers la nuit, la neige et le bombardement. Qu'un seul coureur eût été atteint et tout s'écroulait.
Au petit jour, le 4e bataillon (de Contenson), s'emparait, en la débordant, de la tranchée des Deux-Ponts qui avait tenu toute la nuit ; la liaison s'établissait avec le commandant Florentin, du 102e Chasseurs, qui était entré dans le village de Bezonvaux et, ce qui achevait la victoire, la 3e Zouaves, sorti du bois des Caurrières, rabattait toute la troupe ennemie dans le Fond des Rousses où elle était prise en masse.
Encore une fois, nous étions vainqueurs ! "

 

Plus à gauche, en liaison directe avec la 133e D.I., la 22e progresse et parvient à reprendre l'ouvrage d'Hardaumont.


L'ouvrage d'Hardaumont tenu par les Allemands (photo allemande)


Bien que les pertes aient été importantes, le bilan de la journée est très satisfaisant. Sur les ailes, tous les objectifs ont été atteints. Au centre, seuls quelques objectifs assignés à la 37e et à la 133e D.I. n'ont put être repris. La 37e D.I. n'a put que partiellement prendre pied dans le bois de la Vauche. Concernant la 133e D.I., si le bois des Caurrières a put être repris dans la nuit par le 3e Zouaves, le bois Hassoulé est encore aux mains de l'ennemi.

Durant la nuit, la fourmilière s'active...
Pendant que les combatants, gelés, épuisés, boueux, s'endorment sous la neige, les états majors s'activent sur les nouvelles cartes, les coureurs s'éforcent de rétablir les liaisons avec les nouvelles lignes, font circuler les rapports et les nouveaux ordres, les artilleurs ravitaillent leurs pièces et les rapprochent de la nouvelle ligne de front, les brancardiers sillonnent les secteurs repris à la recherche des blessés, chanceux sont ceux qui parviennent à être évacuer.


Brancardiers recherchant des blessés

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16 décembre
Les divisions de soutient se rapprochent et commencent leur montée en secondes lignes.

Dés l'aube, les Allemands entament un violent bombardement présageant une attaque. Elle se déclenche dans la journée entre les Chambrettes et le bois des Caurrières. Cependant, malgré leur ténacité, les assaillants ne parviennent pas à passer les lignes françaises. Les Poilus entendent bien conserver les positions qu'ils sont parvenue à reconquérir la veille.

La nuit arrive avec une brusque chute de la température. Les conditions deviennent extrêmes dures et beaucoup d'hommes doivent être évacués pour pieds gelés.
Témoignage de Bastien FEICE, soldat au 4e Zouaves :
" C'est à la fin de l'attaque que commença notre véritable calvaire. La neige qui tombait sans arrêt depuis deux jours, s'arrêta pour faire place à un froid des plus rigoureux. Le thermomètre était descendu à - 20°.
Ceux d'entre nous que les obus et les balles avaient épargnés n'étaient plus, à l'aube, des hommes, mais des formes, des silhouettes glacées, boueuses et presque dans vie. Tous, ou presque tous, nous avions les membres gelés, les uns les mains, les autres les pieds, sans compter ceux, nombreux, ayant les deux jambes gelées. Personnellement, j'eus les pieds gelés au premier de gré. Pour atteindre le porte de secours, distant de 1 500 mètres environs, il me fallut près de quatre heures. "


Blessés tentant de regagner l'arrière

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Du 17 au 18 décembre
Malgrés le froid, les assauts se poursuivent et les bois de la Vauche et Hassoulé parviennent à être repris par les Français.

Le dernier événement de l'offensive de décembre est la reprise de la ferme des Chambrettes par le 4e Zouaves.
Historique du 4e Zouaves : " Dans la nuit du 16 au 17, commencent les relèves des éléments épuisés par la lutte. Les positions conquises sont aménagées.
La ferme des Chambrettes reste cependant à conquérir. Le 4e Zouaves reçoit la mission de la prendre.
Nos hommes, dés le 16, se trouvent dans un état lamentable. Dans l'eau jusqu'aux genoux, enduits jusqu'au sommet de leur casque d'une boue gluante, ils commencent à éprouver la morsure du froid. La paralysie les gagne, leurs pieds gèlent. Grelottants de fièvre, mais stoïque quand même, ils restent là sans quitter leur poste, paquets de hardes et de boue, immobiles, silencieux, statues de glace vivantes et douloureuses.
Aussi, le 17, tous attendent la relève. Il leur semble impossible de souffrir davantage. Ils n'ont pas peur, mais quelques-uns pleureront quand on leur dira : " Ce n'est pas pour aujourd'hui ! " Et il faut ajouter le motif de ce retard. C'est que, de toute nécessité, la ferme des Chambrettes doit être reprise et reprise par eux. Notre communiqué en a annoncé la conquête. Des Français ne mentent pas. Avant que le 4e Zouaves ne quitte ses lignes, elle sera de nouveau à nous.
Les hommes encore valides (ils sont à peu près 30 par compagnie) font appel à toute leur énergie. Les officiers donnent l'exemple. Le lieutenant Triballet, ne pouvant marcher, se fait soutenir par deux mitrailleurs.
L'attaque se déclenche vers 15 heures. Elle est arrêtée par un feu de mitrailleuses qui nous cause des pertes sensibles. Il faudra donc une opération d'artillerie.
Le 18 à midi, à l'aide du 3e bataillon, l'attaque sera reprise. A 16h30, le capitaine Goujat établira son P.C. dans la ferme ; et le commandant Pouzergues pourra, dans son compta rendu, parler de l'entrain admirable des hommes qui, s'appuyant pour marcher sur leurs fusils boueux et devenus inutilisables pour le tir, criaient les uns aux autres : " En avant les béquillards ! ". "

Témoignage du capitaine Félix POURAILLY, du 283e R.A.I. : " Les Zouaves ont tout culbuté, mais ces vainqueurs ont été eux-mêmes vaincus par le froid. Ils s'en reviennent, sur une file interminable, par petit paquets, deux par deux. Ils ont enlevé le dessus de leurs souliers, ne gardant que les semelles maintenues avec des étoffes ; la plupart vont pieds nus, les pieds enroulés dans leur cache-nez, leur chéchia, leur mouchoir…
Ils avancent, hésitant, titubant, s'appuyant sur leur fusil comme sur une béquille, se soutenant l'un, l'autre, se traînant à quatre pattes, comme de pauvres bêtes, et de cette longue file de silhouettes clopinantes, aux capote de boues raidies par le gel, aux physionomies noires et sales tendues pat la douleur, pas une plainte ne s'élève, pas un murmure ne monte. "


L'objectif de l'offensive de décembre est pleinement réussi, le dégagement des forts, la reprise des observatoires et de leurs points d'accès. 11 387 Allemands ont été capturés, dont 284 officiers. 115 canons, 44 lance-bombes et 170 mitrailleuses ont été pris à l'ennemi ou détruits.

L'hiver et l'état du champ de bataille ne permettent pas sérieusement à l'Allemagne de tenter une contre-offensive avant plusieurs mois. De plus, dans cette bataille, elle a déjà englouti plus de 143 000 tués et 190 000 blessé.


Front au 18 décembre 1916

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