Les Grands Hommes de Verdun

 

Le général Pétain :
25 février - Prise de pouvoir du général Pétain
5 mars - Pétain prend les choses en mains !
10 mars - Joffre rend visite à Pétain !
Début avril - Pétain et Poincaré

12 avril - Pétain commence à songer à passer à l'action !
Début mai - Pétain est écarté de la bataille par Joffre !

Le général Nivelle :

Le général Mangin :
Mai 1916 - Le général Mangin organise une grande offensive pour rependre le fort de Douaumont
24 mai - Mangin relevé du commandement du secteur de Douaumont !

Le général Falkenhayn :
Pourquoi le général von Fankenhayn a choisi d'attaque à Verdun ?
Début juin - Falkenhayn veut frapper un grand coup pour enfin en finir avec Verdun !

Le colonel Driant :
Janvier et février 1916 - Le colonel Driant tente d'alarmer le G.Q.G. sur l'état pitoyable de son secteur
20-21-22 février 1916 - La chute du bois des Caures et la mort du colonel Driant

Le commandant Raynal :
Du 1er juin au 7 juin - Siège du fort de Vaux

Le lieutenant Dupuy :
11 et 12 juillet - Défense du fort de Souville et arrêt définitif de la progression allemande sur Verdun


 

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Le général Pétain :


Philippe Henri Benoni Omer Joseph Pétain est n
é le 24 avril 1856 à Cauchy-la-Tour (Pas-de-Calais) dans une famille modeste.
Il fait ses premières études chez les Dominicains, puis entre à Saint-Cyr en 1876. Il en sort avec un niveau modeste, et se dirige naturellement vers une carrière militaire qui s’annonçe très simple. Lieutenant de chasseur à pied, il est affecté à des garnisons secondaires et ne participe à aucune des grandes campagnes coloniales.
En 1904, il devient capitaine est et nommé professeur adjoint d'infanterie à l'École de guerre par le général Bonnal. Là, Pétain prend toute sa dimension en se faisant le défenseur de la guerre de position, théories peu conformes aux conceptions tactiques de l'état-major qui prônent la guerre à outrance.
Le général Bonnal écrira de lui : " Capitaine remarquable, aussi bien comme officier d'état-major que comme officier de troupe. Réunit les qualités de vigueur, de coup d'œil, de décision et d'intelligence dans la juste proportion désirable chez un futur grand chef. "

Lorsqu'éclate la première guerre mondiale, il a 58 ans, il est devenu colonel et s'apprête à prendre sa retraite. Cependant, il prend la tête d'une brigade d'infanterie et après s'y être distingué, notamment en Belgique, il est promu général de brigade. Plus tard, il est nommé général de corps d'armée et remporte de brillants succès dans les batailles de l'Artois. Il se distinguer, en particulier, par sa prudence et le souci qu'il témoigne à épargner la vie de ses hommes.

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25 février - Prise de pouvoir du général Pétain :

Le général de Castelnau, qui a reçu les pleins pouvoirs du général Joffre, confie au général Pétain le commandement de la région fortifiée de Verdun et des forces arrivant sur les deux rives. Il a une liberté complète de mouvement, et autant que possible, tous les moyens qu'il demandera.

Dés 8 h du matin Pétain se présente à Chantilly devant le général en chef. Lui et son état major doivent très rapidement se mettre en route vers Bar-le-Duc et s'installer dans le quartier général qui se trouve dans la mairie de Souilly, petit village sur la route entre Bar-le-Duc et Verdun.
Ce n'est qu'à la nuit qu'il arrive enfin à Souilly. Il a appris dans la soirée la chute du fort de Douaumont. Aussitôt, il prend ses fonctions et organise un entretient avec le colonel Barescut, chef d'état-major de la IIe armée. Cette réunion dure une bonne partie de la nuit.

Témoignage du général Pétain : " A 11 heures du soir, dès mon retour à Souilly, le général de Castelnau transcrivait mon ordre de mission sur une feuille de son calepin de poche, la détachait et me la passait " pour exécution immédiate ".
A 11 heures, je prenais donc la direction de la défense de Verdun, déjà responsable de tout et n'ayant encore aucun moyen d'action…
Dans la salle vide de la mairie, je me mettais en communication téléphonique avec le général Balfourier, commandant les forces engagées dans le secteur d'attaque.
Allo ! C'est moi, général Pétain. Je prends le commandement. Faites-le dire à vos troupes. Tenez ferme. J'ai confiance en vous - C'est bien, mon général. On tiendra ! Vous pouvez compter sur nous comme nous comptons sur vous.
Aussitôt après, j'appelais le général de Bazelaire, commandant les secteurs de la rive gauche, et je lui donnai les mêmes avertissements, en lui indiquant le prix exceptionnel que j'attachais à la conservation de nos positions à l'ouest de la Meuse. Il me répondait, comme venait de la faire le général Balfourier, sur le ton d'une confiance affectueuse et absolue.
La liaison morale, du chef aux exécutants, était assurée.
Un peu plus tard, vers minuit, arrivait le colonel de Barescut, mon chef d'état-major. Sur une carte à grande échelle plaquée au mur, je marquais au fusain les secteurs des corps d'armée en position, ainsi que le front à occuper, et je dictais l'ordre que l'on devrait faire parvenir à toutes les unités le lendemain matin.
Tels furent, à Verdun, mes premiers actes de commandement. "


La mairie de Souilly

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5 mars - Pétain prend les choses en mains !

Le général Pétain à dés le 1er mars prit un certain nombre de mesures précises afin de rétablir techniquement la situation sur la Voie Sacrée, par laquelle se fait le ravitaillement de la bataille (voir le thème sur "La Voie Sacrée").
Il poursuit son travail en reconstituant les divisions et les brigades et en formant des " groupements de commandement ". Il entreprend les démarches permettant le réarmement des forts des 2 rives, crée des places d'armes, des dépôts, des cantonnements et trace de nouvelles voies d'accès.
De plus, il s'attaque avec ardeur et ténacité à la question " artillerie ". Il veut que le nombre des batteries sur le front de Verdun décuple et ne cesse de demander plus de canons au Q.G. de Chantilly. Il éduque également ses généraux sur sa vision de l'artillerie, afin qu'ils emplois leurs canons beaucoup plus, dans de meilleurs condition et avec beaucoup plus d'efficacité.


Pétain dans son bureau à Souilly

Témoignage du général Pétain : " Je ne cessais de stimuler l'activité de l'artillerie. Lorsque les agents de liaison des corps d'armée, venue au rapport quotidien de Souilly, m'exposaient par le menu les combats engagés sur leurs fronts respectifs, je ne manquais pas de leur couper la parole par cette interrogation :
- Qu'ont fait votre batterie ? Nous parlerons ensuite des autres détails.
Au début, les réponses étaient confuses… Mais comme je m'en irritais, ma préoccupation dominante se répercutait dans les états-majors intéressés, dont les comptes rendus marquèrent bientôt un sensible progrès. Notre artillerie, suivant mes directives, prenait l'offensive par des concentrations de feux qui étaient de véritables opérations, soigneusement préparées et qui, sans lui causer de pertes, en produisaient chez l'ennemi.
Je répétais constamment :
- Il faut que l'artillerie donne à l'infanterie l'impression qu'elle la soutient et qu'elle n'est pas dominée ! "

Cependant, malgré toute l'énergie déployée par Pétain, il doit faire face au Grand Q.G. qui rechigne à mobiliser de lourds moyens sur Verdun. La bataille de la Marne est en préparation et semble plus importante. Ce n'est qu'au compte goute que de nouvelles batteries sont envoyées.

Témoignage du commandant P... : " Comment peut-on dire qu'au six mars, l'équilibre des forces adverses en infanterie et en artillerie de campagne, sinon en artillerie lourde, est réalisé ? On savait à la 2e Armée que les effectifs allemands accumulés sur le front étaient formidables, mais, fidèle à la tactique qu'il dû instaurer pour cacher ses lourdes responsabilités, le G.Q.G. a toujours "nié Verdun". Si l'on avouait toute l'importance de l'attaque allemande sur Verdun, on devait, en toute justice, accepter aussi que ce n'était pas le général Herr qui devait être poursuivi. Il était beaucoup plus facile de déclarer que Verdun était une attaque comme les autres ; toutes les fois où un officier de l'état-major de la 2e Armée allait en liaison au G.Q.G., il trouvait au 3e bureau des petits rires goguenards "Ah ! tu vas encore essayer de nous faire croire à Verdun."
Un grand nombre de divisions allemandes en ligne à Verdun n'ont pu être identifiées au début de mars par "les moyens habituels" de renseignement, en bon français l'espionnage. Restaient les interrogatoires de prisonniers. Or, combien de prisonniers allemands avions-nous fait au 5 mars ? Et que savait un homme en première ligne, sur les troupes qui étaient derrière lui ?… "

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10 mars - Joffre rend visite à Pétain !

Dans la matinée, le général Joffre vient rendre visite au commandant de la IIe Armée dans sa mairie à Souilly.


Pétain et Joffre à Souilly

Bien qu'il ne jure que part "sa grande offensive sur la Somme", les événements qui se déroulent à Verdun l'inquiète. Le général Pétain lui réclame sans cesse de nouvelles pièces d'artillerie qu'il souhaiterait voir conservées pour son attaque sur la Somme, en pleine étude.
Témoignage du commandant P... : " Pour le G.Q.G., l'attaque de Verdun par les Allemands avait le tort considérable de constituer un obstacle à la préparation de notre propre attaque sur la Somme :
- Comment pouvons-nous songer à faire la Somme, si nous usons toutes nos divisions à Verdun. C'est la Somme qui dégagera Verdun, disait le G.Q.G.
A quoi ripostait le IIe Armée :
- Il est surtout pressant d'empêcher Verdun de tomber. A quoi bon faire la Somme si vous avez perdu Verdun ? "

Après une journée d'entretient avec Pétain, Joffre promettait de faire son possible pour alimanter Verdun en canons, et rédigeait le premier ordre du jour historique de la bataille.
Ordre du jour pour la journée du 11 mars : " Soldats de l'armée de Verdun ! Depuis trois semaines, vous subissez le plus formidable assaut que m'ennemi ait encore tenté contre nous. L'Allemagne escomptait le succès de cet effort qu'elle croyait irrésistible et auquel elle avait consacré ses meilleures troupes et sa plus puissante artillerie. Elle espérait que la prise de Verdun raffermirait le courage de ses alliés et convaincrait les pays neutres de la supériorité allemande. Elle avait compté sans vous.
Nuit et jour, malgré un bombardement sans précèdent, vous avez résisté à toutes les attaques et maintenu vos positions. La lutte n'est pas encore terminée car les Allemands ont besoin d'une victoire. Vous saurez leur arracher. Nous avons des munitions en abondance et de nombreuses réserves. Mais vous avez surtout votre indomptable courage et votre foi dans la République. Le pays a les yeux sur vous.
Vous serez de ceux dont on dira : " Ils ont barré aux Allemands la route de Verdun ! " "

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Début avril - Pétain et Poincaré :

le 2 avril, Pétain réitère sa demande de nouvelle troupe. Joffre lui répond en ses termes qui ne laissent aucune équivoque : " Vous connaissez la situation générale de l'ennemi et celle des forces françaises. Vous devez en conséquence tout faire pour que je ne sois pas obligé, dés maintenant, de faire appel au dernier corps frais que j'ai disponible "

En plus des réticences que Joffre témoigne à lui envoyer les troupes fraîches qu'il demande, Pétain doit faire face à l'incompréhension des politiques de l'arrière.
Le président de la République Mr Poincaré, loin de la réalité de Verdun, ne comprend pas pourquoi les surfaces de terrain reprises à l'ennemi sont si minuscules. Ou souvent, un seul nom de tranchée reconquise en mentionné dans les communiqués.
Lorsqu'il regarde la carte du front, le président voit le fort de Douaumont à 400 m des positions Fr. les plus avancées. Et il lui semble qu'une forte offensive vite mise sur pied et rapidement menée peut facilement reconquérir ces 400 m et reprendre le fort de Douaumont (succès qui aurait un retentissement immense). Cependant, lorsqu'il s'entretient avec Pétain, ce dernier émet de grosses réserves pensant à l'inverse que ce n'est pas le bon moment et qu'une contre-offensive doit être préparée très méticuleusement.
émoignage du général Pétain : " Le Grand Quartier Général ne voyait pas l'ensemble de nos difficultés. Il lui semblait que la lutte prenait une allure traînante et que nos réactions tardaient. Comme j'avais rendu compte, le 8 avril, d'un redressement de nos lignes au sud de Béthincourt, point d'appui formant désormais un saillant inutile en avant de notre " position de résistance ", je recevais aussitôt l'ordre de rétablir le statu quo ante par " une vigoureuse et puissante offensive à exécuter dans les plus bref délai "…
Je répliquai par un télégramme : " La situation sur la rive gauche n'est pas mauvaise. J'espère arriver à arrêter complètement l'ennemi. Mais le choix de la position a une très grande importance. Je demande donc qu'on me fasse confiance et qu'on ne se laisse pas impressionner par quelques reculs partiels prémédités."

Cette prudence dont fait preuve Pétain, qui connaît les dures conditions de combat, la ténacité de l'adversaire et la situation actuelle, n'est pas comprise par les politiciens de Paris, et interprétée comme une certaine passivité. Cette situation commence peu à peu à agacer au ministère, et cela conduire finalement à son remplacement futur...

Cependant, pour le moment, Pétain fait tout ce qu'il peut avec les moyens dont il dispose, et il n'est pas du tout " passif ". Il s'inquiète notamment sur la nécessité d'augmenter le nombre d'avion qui est très inférieur à celui des All.
Depuis peu, l'aviation commence à prendre de l'importance dans la guerre, avion d'observation, de réglage d'artillerie, de photographie, de destruction. Cependant, cette arme moderne n'en ai qu'à son balbutiement et a de gros progrès à faire. Les avions monoplace ouverts aux vents, sont légers et fragile, mais les modèles All. sont les plus puissants et les plus modernes (biplan bimoteur Fokker). Le tir de mitrailleuse à travers l'hélice vient juste d'être inventé.

Témoignage du lieutenant Jacques MORTANE de l'escadrille M.F. 19 : " Il est une réforme que réclament tous nos chasseurs de l'air. Alors qu'ils ne disposent que de bandes de 47 cartouches pour leurs mitrailleuses, les Allemands ont le loisir de tirer 1000 balles sans armer à nouveau. Oui, 1000 contre 47, soit 953 chances de plus de triompher dans les combats aériens. C'est un handicap que la maestria des nôtres ne peut pas toujours combler.
Pour bien s'en rendre compte, il faut voir en quoi consistent les manœuvres de la mitrailleuse à bord d'un monoplace ; une fois les 47 cartouches tirées, le pilote s'aide péniblement des genoux pour tenir son manche à balai en tâchant de maintenir l'appareil en ligne de vol. Il saisit son arme d'une main, l'anneau qui la décroche de l'autre, la rabat, retire le disque avec les deux mains, le jette dans le fond du fuselage, prend une autre bande, la place sur la mitrailleuse, arme et raccroche.
Lorsque tout va à souhait, c'est là un travail qui nécessite au moins trente secondes pendant lesquelles l'avion est à la merci de l'ennemi qui peut gaspiller ses munitions sans crainte : dame, 1000 balles ! Ces trente secondes sont un minimum rarement obtenu et pourtant elles constituent déjà un temps qui semble immémorial. Que de choses, que de drames peuvent se dérouler en une demi minute, lorsque vous êtes en face d'un adversaire attaché à votre perte !
Et combien d'inconvénients proviennent de cette inégalité dans l'armement ! Alors que l'Allemand ouvre le feu à 200 ou 300 mètres, nos pilotes sont obligés d'attendre d'être à moins de 30 mètres. Ils approchent le plus qu'ils peuvent pour perdre le moins de balles possible. Or, à 3000 mètres dans l'espace, ce sont deux volontés qui se trouvent en présence ; c'est le duel où il faut une victime. L'avantage n'est-il pas à celui qui a mille cartouches à brûler ? "

Depuis le début de la bataille, l'ennemi a rassemblé ses meilleurs appareils et ses meilleurs pilotes. Et depuis le 21 février, ce sont eux les maîtres du ciel de Verdun.
Témoignage de E. LOUIS, soldat au 25e B.C.P : " Un jour, d'un trou d'obus, je vois un de nos avions aux prises avec 5 avions ennemis. Se rendant compte qu'il ne peut s'échapper, l'avions français fonce soudain sur un de ses agresseurs et les deux avions s'abattent en tournoyant entre les deux lignes. Se voyant perdu, notre aviateur n'avait pas voulu mourir seul. "

Pétain entend inverser la donne et convoque le commandant de la 1ere escadrille de chasse de la 5e armée, le commandant de Tricornot de Rose. Il lui confie le commandement des 8 escadrilles réunies à Bar-le-Duc, avec la mission impérative d'égaler et de dépasser le niveau des All.
En d'autres termes, Tricornot de Rose a les pleins pouvoir et une consigne simple : " Nettoyer le ciel de Verdun. "

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12 avril - Pétain commence à songer à passer à l'action !

Bien qu'il pense que le bon moment pour l'offensive ne soit pas encore venu, Pétain demande à Nivelle d'étudier une attaque de grande envergure visant à reprendre le fort de Douaumont.
Témoignage du général Pétain : " Au début du printemps, les Allemands conservaient sur nous une grande supériorité de moyens. Aussi ma conviction restait-elle entière que nous n'étions pas mûrs pour les grandes ripostes.
Conformément à mes instructions, le général Nivelle étudiait et préparait méthodiquement la reprise du fort de Douaumont sans rien brusquer et en se tenant prêt à exploiter les circonstances propices…
… Les Français ne peuvent s'en tenir à une défensive passive et se résigner à reculer un peu chaque jour, car chaque mètre en profondeur a sa valeur ; on n'a pas derrière soi une zone profonde où l'on puisse reculer indéfiniment ; il faut absolument empêcher les Allemands d'atteindre la crête Souville-Saint-Michel (à 2 km au nord-est de Verdun), d'où ils pourront pointer directement leurs pièces sur Verdun. D'autre part, un recul continu affecterait péniblement le moral des défenseurs. Il est d'ailleurs prouvé qu'on perd plus de monde dans la défense que dans l'attaque bien préparée et bien appuyée. "

Pour cela, Pétain réinsère une fois de plus à Joffre sa demande de nouvelles troupes : " L'envoi de nouvelles unités est nécessaire. Je demande avec insistance que ces nouvelles unités soient choisies parmi celles qui n'ont pas encore paru sur le front de Verdun. La violence et la continuité du bombardement, la difficulté des liaisons et des ravitaillements, l'importance des pertes subit suffiraient à expliquer l'usure très accélérée des troupes qui sont appelées à un second séjour sur un front aussi périlleux.
Il est à remarquer que les troupes qui reviennent au front pour la seconde fois ont été reconstituées à l'aide de la classe 1916 ; ces recrues n'ont jamais vu le feu et l'on constate qu'elles se laissent impressionner par le bombardement auxquelles elles sont soumises, plus que les contingents anciens. "

" Mon coeur se serrait, quand je voyait aller au feu de Verdun nos jeunes gens de vingt ans, songeant qu'avec la légèreté de leur âge ils passeraient trop vite de l'enthousiasme du premier engagement à la lassitude provoquée par les souffrances, peut-être même au découragement devant l'énormité de la tâche à accomplir.
Du perron de la mairie de Souilly, mon poste de commandement si bien placé au carrefour des chemins conduisant vers le front, je leur réservais ma plus affectueuse attention quand ils montaient en ligne avec leurs unités : cahotés dans les inconfortables camions ou fléchissant sous le poids de leur appareil de combat quand ils martchaient à pieds, ils s'existaient à paraître indifférents par des chants ou des galéjades et j'aimais le regard confiant qu'ils m'adressaient en guise de salut.
Mais quel découragement quand ils revenaient, soit individuellement comme éclopés ou blessés, soit dans les rangs de leurs compagnies appauvries par les pertes ! Leur regard insaisissable semblait figé dans une vision d'épouvante : leur démarche et leurs attitudes trahissaient l'accablement le plus complet ; ils fléchissaient sous le poids de souvenirs horrifiants ; ils répondaient à pzinz quand je les interrogeais et, dans leur sens troublés, la voix goguenarde des vieux poilus n'éveillait aucun écho."

Ce dernière témoignage du général Pétain permet de mieux cerner l'homme. Un général de guerre se doit par devoir, de ne pas songer ni imaginer les souffrances subit par les combattants. Il doit conserver une imagination abstraite afin de mener à bien et dans les meilleurs conditions son rôle de commandement. Sans pour autant être un bourreaux sanguinaire, un général ayant une telle bataille en charge, à la mission inexorable d'envoyer des hommes au combat, et de leur demander l'impossible. Ses considérations "sentimentales" sont généralement réservées aux poètes ou aux écrivains.

La guerre de 14-18 a souvent le cliché de généraux envoyant à la morts des milliers d'hommes pour la reconquête de positions minimes et désuètes, et cela, pour servir leur gloire personnelles. Ca a été en effet une réalité.
Cependant, le général Pétain n'était pas de ceux là. Il avait réellement une grande considération pour ses hommes, et du début à la fin de son commandement, tout en sachant les événements incroyables et les difficultés énormes qu'il a dû surmonter, a toujours essayé dans la mesure du possible, de ménager les combattants de Verdun.

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Début mai - Pétain est écarté de la bataille par Joffre !

Depuis la perte du fort de Douaumont, le 25 février, le G.Q.G. n'a jamais cessé d'imaginer un plan pour le reprendre. Le général Joffre a inlassablement réclamé cette offensive au général Pétain, mais ce dernier, conscient de l'infériorité de l'artillerie Fr. sur l'artillerie All., a toujours tenté d'en reculer l'échéance. Le 12 avril, le général Nivelle a tout de même été missionné pour mettre sur pied un plan d'attaque. Mission qu'il a lui même confié à son subordonné direct, le général Mangin.
Joffre, agacé par les réserves émisses en permanence par Pétain, parvient très subtilement à s'en débarrasser. Il ne peut pas limoger un tel chef, qui a tant œuvré pour Verdun depuis 2 mois et dont toutes les entreprises ont été un succès. Il éloigne donc Pétain du champs de bataille de Verdun par une manœuvre très habille, en l'élevant en grade. De commandant de la 2e armée, il devient commandant des Armées du centre, ou Verdun n'est plus qu'un élément.

Pétain installe donc son Q.G. à Bar-le-Duc et nomme le général Nivelle au commande de la bataille de Verdun.
Témoignage du général Pétain : " Ma tristesse était profonde lorsque je passai au général Nivelle le commandement de la 2e Armée. J'installais mon nouveau quartier général à Bar-le-Duc et me mettais en mesure d'interpréter au mieux l'ordre donné par le commandant en chef : " La mission du général Pétain est d'assurer sur tout le front du groupe des armées du centre, l'inviolabilité des positions et, en ce qui concerne le front de Verdun, de prendre possession du fort de Douaumont. "
On me prescrivait en outre d'alimenter l'armée de Verdun à 24 divisions avec les seules ressources du groupe des armées du centre. Je devais même m'efforcer de réduire ce nombre. "

Témoignage du commandant P. : " Il est sans doute superflu de redire que la nomination de Pétain le 25 février au soir au commandement de l'armée de Verdun avait été bien accueillie de la troupe. Tout nouveau chef reçoit toujours de la troupe un sympathique accueil : les journaux se chargent de la publicité nécessaire.
Cependant, en ce qui concerne Pétain, le bon accueil s'appuyait sur deux raisons qui ne devaient rien au Bureau de Presse officiel. En premier lieu, on l'estimait pour son avancement foudroyant, mais tardif : le soldat, dont chaque seconde de vie est une injustice, réelle on imaginée, a pour la justice un amour qui touche à la passion. En second lieu, on l'aimait pour son humanité, encore qu'il manquât à cette humanité un peu de la spontanéité qui peut seule la rendre irrésistible.

La popularité de Pétain, bien supérieure à celle de Joffre, bien inférieure à celle de Foch, ne fut jamais aussi forte qu'on a essayé de le faire croire, aussi forte qu'elle l'eut été quelques mois plus tard si on l'avait laissé à son P.C. de Souilly. Pétain a été contraint, par des événements inouïs, d'imposer à ses hommes des sacrifices inouïs, et quand il les a quittés, l'Allemand n'avait pas cessé un seul jour de grignoter notre terre de Verdun. Comment exiger d'eux des larmes ?
Les soldats n'aiment vraiment, au sens absolu du mot, que deux sortes de chefs : ceux qui les mènent à la victoire et ceux qui risquent leur vie à leurs côtés.

On comprend très bien les jugements très divers portés sur le général Pétain suivant que l'on a approché plus ou moins près cet homme d'un froid et d'un calme déconcertants, que l'on a vécu ou non près de lui, et pu surprendre les indices d'une sensibilité profonde.
Le général est un grand timide, il le sait et il en souffre. Pour éviter l'emprise des autres et protéger sa personnalité, il s'est créé une façade, une cuirasse de glace, et il attaque. Sa parole mordante, quelquefois brutale ou cruelle, arrête son interlocuteur, le rend timide, lui aussi, et le général se trouve à égalité. Cependant, si l'on a la bonne fortune de vivre dans son sillage, de le voir dans les multiples incidents de la vie journalière, la façade se lézarde, et laisse apercevoir un cœur profondément humain, une sensibilité touchante. Mais combien peu nombreux ceux qui ont pu apercevoir ces éclairs ? Il en imposait au soldat par sa majesté et aussi parce que celui-ci savait que les états-majors "en prenaient pour leur grade" chaque fois que le bien-être de l'homme était en jeu.
Connaissant admirablement notre soldat, il s'est préoccupé de lui assurer un ravitaillement ample et varié. Il a ordonné ses plaisirs en arrière du front, réglé ses permissions à l'intérieur. Il a sauvé la France parce qu'il connaissait et aimait l'homme, notre admirable soldat français. Personne en dehors de lui ne pouvait reconstruire une armée comme il l'a fait en 1917. Foch n'aurait pas pu vaincre, si Pétain ne lui avait auparavant reforgé son outil. C'est pour cela qu'on ne peut les séparer.
Si, à Verdun, le soldat et surtout l'officier de troupe ne lui ont pas rendu toute la justice qu'il méritait, c'est qu'il s'est trouvé dans des conditions exceptionnelles. Qu'a-t-il constamment demandé aux hommes, exigé d'eux : "Mourir s'il le faut, mais arrêter le Boche". Et cela pendant des semaines et des semaines. Il est difficile de devenir populaire dans ces conditions. Le général se bat contre le Boche, mais surtout avec l'arrière, et jamais il n'a pu entrevoir d'autre possibilité que "d'arrêter le Boche", c'est tout ce qu'il peut faire avec les moyens dont il dispose. Par la suite, le général doit résister aux conseils d'attaque qui lui parviennent de tous côtés. Au G.Q.G., un bureau refuse de donner satisfaction à ses demandes ou les sert à retardement ; un autre bureau du même G.Q.G. s'étonne que l'on n'ai pas déjà repris tout le terrain. - Mais qu'est-ce que fait Pétain, pourquoi est-ce qu'il n'attaque pas ?
Un antagonisme profond n'a cessé d'exister entre l'armée de Verdun et le G.Q.G. ; le général Pétain ne tarissait pas en réclamations de tout genre : personnel, matériel, ravitaillement, transport ; c'est toujours en rechignant que satisfaction lui fut donnée et dans quelle mesure ! avec quelle lenteur !

Avec son beau calme, Pétain laisse dire, mais il agit : il arrête le Boche. Quand des parlementaires viennent lui demander si le Boche passera, il répond : - J'espère que non. Son prédécesseur à la IIe Armée, le général Nivelle, aux même questions, répond : - Jamais il ne passera. Cette belle confiance nous a valu les tristes aventures d'avril 1917. "


Le général Pétain visite les soldat

 

 

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Le général Nivelle :

Robert Georges Nivelle est né le 15 octobre 1856 à Tulle (Corrèze) d'un père français et d'un mère anglaise.
Il fait ses études à l'Ecole Polytechnique pour être officier d'artillerie et il en sort diplômé en 1878.
Il sert tout d'abord en Indochine puis est envoyé en Chine en 1900 pour réprimer la révolte des Boxers. Il commande ensuite le IVe régiment d'artillerie en 1911 puis sert en Algérie.
Lorsqu'éclate la première guerre mondiale, il a 58 ans, il est devenu colonel et commande le 65e régiment d'artillerie. Il s'illustre en septembre 1914 lors de la bataille de l'Ourcq où ses canon mette en déroute le 4e corps de la 1e armée du général Von Kluck.
Cette victoire lui vaut d'être promu général de brigade octobre 1914.
Jusqu'en avril 1916, il commande de 3e corps d'armée. Le 20 mai, il succède au général Pétain dans la défense de Verdun.


 

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Le général Mangin :

Charles Marie Emmanuel Mangin est né le 6 juillet à Sarrebourg (Moselle) en 1866.
Le 17 août 1885, il s'engage au 77e Régiment de ligne. Le 30 octobre 1886, il est admis à l'Ecole militaire de Saint-Cyr ou il suis des études de fantassin.
De 1891 à 1894, il sert au Sénégal puis au Soudan à la tête d'un bataillon de tirailleurs sénégalais. C'est un fervent défenseur de l'armée d'Afrique, plus importante et plus puissante. Courageux, infatigable, robuste, meneur d'homme et homme d'action, il incarne le type même de l'officier colonial. Blessé à 4 reprises, il est fait officier de la légion d'honneur
De 1898 à 1899, sous les ordres de Jean Marchand, il participe à la mission qui, partant du Congo, traverse l'Afrique d'ouest en est.
En 1899, le devient capitaine puis chef de bataillon d'état-major en Indochine. Il rejoint ensuite le 8e Régiment de Tirailleur Tonkinois puis le 6e Régiment d'Infanterie Coloniale.
En 1905, il devint lieutenant-colonel et commande l'état-major du commandement supérieur du Soudan Français.
De 1907 à 1913, il participe à la Campagne du Maroc avec le grade de colonel, sous les ordre du général Lyautey. Il se distingue entre autre lors de la prise de Marrakech..
Lorsqu'éclate la première guerre mondiale, il a 48 ans, il est devenu général de brigade et est affecté à l'état major de l'armée.
Dés août 1914, il prend de commandement de la 8e Brigade d'Infanterie. Un mois plus tard, il devient commandant de la 5e D.I. de Rouen. Il y obtient sa première citation à l'ordre de l'armée.
En 1915, durant la bataille des frontières, il remporte la victoire de Charleroi, puis combat sur la Marne et en Artois.
En mai 1916, sous les ordres du général Nivelle, il reçoit la mission d'organiser une offensive pour reprendre le fort de Douaumont.

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Mai 1916 - Le général Mangin organise une grande offensive pour rependre le fort de Douaumont :

Depuis la perte du fort de Douaumont, le 25 février, le G.Q.G. n'a jamais cessé d'imaginer un plan pour le reprendre. Le général Joffre a inlassablement réclamé cette offensive au général Pétain, mais ce dernier, conscient de l'infériorité de l'artillerie Fr. sur l'artillerie All., a toujours tenté d'en reculer l'échéance. Le 12 avril, le général Nivelle a tout de même été missionné pour mettre sur pied un plan d'attaque. Mission qu'il a lui même confié à son subordonné direct, le général Mangin.

Tout les mois de mars et avril, le général Mangin reconsidère et repense ce plan d'attaque. C'est le 13 mai qu'il fixe définitivement le projet et en arrête les objectifs.

L'offensive est prévue pour le 22 mai. La 5e D.I. (36e, 74e, 129e et 274e R.I.) commandée par Mangin, appuyée par la 36e (18e, 34e, 49e et 218e R.I.) et une puissante artillerie doivent attaquer simultanément dans un même élan. L'artillerie doit embraser les lignes All. durant les 7 jours qui précèdent l'attaque afin de désorganiser l'artillerie et miner le moral de l'ennemi.

(voir le thème sur "Le fort de Douaumont")

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24 mai - Mangin relevé du commandement du secteur de Douaumont !

En pleine offensive sur le fort de Douaumont, débutée le 22 et pratiquement perdue pour les Fr. en ce 24 mai, le général Mangin est relevé de ses fonctions par son chef, le général Lebrun en plein aprés-midi.
Il passe le commandement du secteur de Douaumont au général Lestoquoi du 36e R.I.
Témoignage du commandant P… : " A 11 h 30, le général Mangin rend compte au général Nivelle qu'il a absolument besoin de 2 bataillons supplémentaires pour tenter une nouvelle attaque.
A 15 heures, vive altercation au téléphone entre le général Lebrun et le général Mangin. Le premier ordonne d'attaquer à nouveau, et le second répond : "Avec quoi ?" Le général Lebrun insiste, devint nerveux : "Il n'est pas admissible de laisser replier nos troupes, il faut garder le fort. Attaquez !" Le général Mangin : "Moi je ne fais pas d'attaque numéro 2, je n'attaque pas sans attaquer, tout en attaquant. "C'en était trop ! Le général Lebrun exaspéré lui crie : "Ah ! vous ne voulez pas attaquer, passez le commandement au général Lestoquoi." Celui-ci était déjà arrivé au P.C., la relève normale du général Mangin étant prévue pour la nuit suivante. Voilà ce qui explique ce passage inhabituel de commandement à 15 h 30. "

Du 18 au 24 mai, la 5e D.I du général Mangin a perdu 130 officiers et 5 507 hommes, soit la moitié de ses effectifs...

 

 

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Le général Falkenhayn :

Erich von Falkenhayn est né le 11 septembre 1861 à Burg Belchau en Pologne.
En 1913, il est nommé ministre de la guerre.
En septembre 1914, il devient général d'infanterie et succède à von Moltke à la tête de l'état-major général allemand du front de l'Ouest. D'un caractère hautain et arogant, tenant des propos acerbes, il gagne rapidement l'hostilité de la plupart des autres généraux de l'armée allemande. Cependant, il a la confiance du Kaiser qui voit en lui l'homme de la victoire.
En 1915, il prépare l'offensive russe. A la fin de l'année, il prépare l'offensive de Serbie.
En 1916, il conçoit la grande offensive sur Verdun qui doit "saigner à blanc" l'armée française. Voyant que celle-ci n'a pas donnée les résultats escomptés, il propose le transfert du front de l'est à l'ouest, s'opposant violemment aux généraux Paul von Hindenburg et Erich Ludendorff.
En août 1916, il est personnellement rendu responsable de l'échec de l'offensive et il est remplacé, le 2 septembre, par le général Paul von Hindenburg.

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Pourquoi le général von Falkenhayn a choisi d'attaquer à Verdun ?

(voir le thème " Pourquoi les Allemands ont choisi d'attaquer à Verdun ? ")

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Début juin - Falkenhayn veut frapper un grand coup pour enfin en finir avec Verdun !

Il devient en effet urgent et primordiale pour l'Allemagne de dégager ce point du front ouest qui englouti tant d'hommes. Les raisons sont simples, les services de renseignement allemand prévoient l'imminence de 3 grandes offensives :
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dans la Somme, conjointement menée par la France et l'Angleterre ;
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sur le front russe, sans doute en Volhynie et en Bukovine ;
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sur le front italien.

Il faut donc rapidement désenclaver Verdun afin de disposer de forces suffisantes pout répondre au mieux aux événements qui se préparent…
Témoignage de Pétain : " Le haut commandement allemand commençait à se rendre compte de la gravité de la situation. La logique eût alors voulu qu'il desserrât progressivement son étreinte autour de Verdun pour rechercher, comme le faisait le haut commandement des Alliés, une autre zone d'action. Cependant il s'obstinait dans son plan : on tenait l'armée française et on ne la lâcherait pas "

Aux vues des terribles pertes que vient de subir l'armée allemande dans ses attaques sur le Mort-Homme et la cote 304, en avril et en mai, il est en effet difficile de comprendre pourquoi Falkenhayn s'obstine. Cependant, la mise en échec récente de l'offensive française sur le fort de Douaumont, du 22 au 25 mai, a semble t-il redonné espoir et réveillé des rêves de victoire…

Falkenhayn veut lancer son attaque sur un front restreint, 5 à 6 km tout au plus, entre la cote du Poivre et Vaux-Damloup. Son plan, toujours très méthodique, se décompose en 2 phases :
- Premièrement, conquérir tous les points stratégiques du secteur d'attaque choisi, en l'occurrence : le fort de Vaux ; l'ouvrage de Thiaumont ; l'ouvrage de Froideterre ; le fort de Souville et la crête de Fleury. Y consacrer pour cela le temps nécessaire, malgré l'urgence, et y employer des forces importantes, jusqu'à 5 divisions s'il le faut ;
- Deuxièmement, solidement encré sur cette nouvelle ligne et maître des fortifications en faisant partie, s'élancer sur Verdun par l'étroit ravin des Vignes dans un suprême et violent assaut, et conquérir la ville.

La première phase va occuper l'armée allemande jusqu'au 22 juin, le point culminant étant la bataille puis le chute du fort de Vaux du 1er et 7 juin. A cette date, 2 crêtes seulement sépareront l'ennemi de la ville, la ligne Thiaumont-Souville-Tavannes et la ligne Belleville-Saint-Michel-Belrupt.
La deuxième phase lancée le 23 juin, va venir se briser le 12 juillet devant le fort de Souville, dernier rempart avant Verdun. Les Allemands ne seront plus qu'à 3 km de la ville, mais ne parviendront pas à percer.
Des 2 côtés, les pertes pour juin et juillet seront colossales.
Aujourd'hui, un monument, un grand lion couché, comme mortellement atteint, symbolise cette extrême limite atteinte par l'armée Allemande.
Dans la soirée du 12 juillet, le Kronprinz reçoit l'ordre, puisque les objectifs fixés n'ont pas pu être atteints, " de se tenir désormais sur une stricte défensive ". L'Allemagne a dés lors perdue la bataille de Verdun. Cette bataille qui devait "saigner à blanc" l'armée française aura également "saignée à mort" l'armée allemande…

 

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Le colonel Driant :

Emile Driant est né le 11 septembre 1855 à Neufchâtel-sur-Aisne (Picardie) dans une famille bourgeoise. Son père est notaire et juge de paix.
Il fait ses études au lycée de Reins ou il est très bon élève. Il obtient le premier prix d'histoire au concours général.
Il se dirige ensuite vers des études militaires et entre à Saint-Cyr en 1875, au grand désarroi de son père qui aurait voulu le voir prendre sa succession.
En 1877, il sort quatrième de sa promotion et débute une carrière militaire au grade de sous-lieutenant d'infanterie. Cette dernière s'annonce prometteuse, un de ses supérieurs écrira de lui : " Petit, mais solide, santé à toute épreuve, très actif et toujours prêt ; monte fort bien à cheval et a un goût très prononcé pour l'équitation, très intelligent a devant lui le plus bel avenir ".
En mai 1884, il part en Tunisie et devient officier d'ordonnance du général Georges Boulanger. Le 29 octobre 1887, très proche du général Boulanger, il épouse sa fille.
En 1896, il est nommé chef de bataillon et en juillet 1899, chef de corps du 1er bataillon de chasseur à pied en garnison à Troyes. En quelques années, il fera de ce bataillon un bataillon d'élite reconnu dans tout le pays.
Lorsqu'éclate la première guerre mondiale, il a 59 ans, il est devenu député de Nancy et écrivain sous le pseudonyme de Danrit. Son âge et ses fonctions ne l'obligent en aucun cas à des obligations militaires, mais sur sa demande, il prend le commandement de 56e et 59e bataillons de chasseurs à pieds le 14 août 1914.
En automne 1915, il prend en charge la défense d'un secteur calme, le bois des Caures à Verdun.

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Janvier et février 1916 - Driant tente d'alarmer le G.Q.G. sur l'état pitoyable de son secteur

Entre janvier et février 1916, le colonel Driant, défenseur du bois des Caures, ne cesse de demander des troupes et du matériel pour remettre en état et renforcer son secteur.

Les 1ère lignes ne sont qu'une suite de tranchées en grande partie éboulées et ne formant pas une ligne continue. Leurs parapets sont étroits et leurs créneaux trop espacés.
Le réseau de fil de fer barbelé est peu dense et en très mauvais état. En certains endroits, il est remplacé par de simples haies en bois, à d'autres, il n'y a rien du tout. Par exemple, l'espace entre le bois d'Haumont et le bois des Caures est pratiquement libre, en cas d'attaque subite, l'ennemi n'aura même pas à réaliser une brèche.
Les postes d'observation sont trop peu nombreux, mal placés, ils n'offrent pas une vision suffisante et efficace.
Les abris et les sapes sont peux profonds et ne protégent que des éclats d'obus. Ils ne peuvent en aucun cas supporter un violent et puissant bombardement.

Toutes ces réclamations restent sans suite, la raison invoquée est qu'il n'est pas nécessaire de renforcer ce secteur puisqu'il est calme et que les Allemands n'attaqueront pas ici.

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20-21-22 février 1916 - La chute du bois des Caures et la mort du colonel Driant

20 février - Un jour avant l'offensive allemande sur Verdun, le colonel Driant écrit à son épouse : " Je ne t'écris que quelques lignes hâtives, car je monte là-haut, encourager tout mon monde, voir les derniers préparatifs ; l'ordre du général Bapst que je t'envoie, la visite de Joffre, hier, prouvent que l'heure est proche et au fond, j'éprouve une satisfaction à voir que je ne me suis pas trompé en annonçant il y a un mois ce qui arrive, par l'ordre du bataillon que je t'ai envoyé. A la grâce de Dieu ! Vois-tu, je ferai de mon mieux et je me sens très calme. J'ai toujours eu une telle chance que j'y crois encore pour cette fois.
Leur assaut peut avoir lieu cette nuit comme il peut encore reculer de plusieurs jours. Mais il est certain. Notre bois aura ses premières tranchées prises dès les premières minutes, car ils y emploieront flammes et gaz. Nous le savons, par un prisonnier de ce matin. Mes pauvres bataillons si épargnés jusqu'ici ! Enfin, eux aussi ont eu de la chance jusqu'à présent… Qui sait! Mais comme on se sent peu de choses à ces heures là. "

21 février - A 16 h, la bombardement allemand s'allonge, 2 millions d'obus sont tombés depuis 7 h 15, soit 3800 par minute. (Le récit complet de cette terrible journée.)
Au bois des Caures, tenu par les 56e et 59e B.C.P. commandés par le colonel Driant, 300 à 400 hommes sont encore en vie sur un effectif de 1300. Le jeune lieutenant Robin, commandant la 9e compagnie, parvient à tenir durant plusieurs heures, avec une poignet d'homme, un minuscule ouvrage à demi effondré. Lorsque les Allemands sont parvenu à encercler l'ouvrage et arrivent de 3 directions en même temps, l'affrontement se poursuit au corps à corps.
Témoignage du colonel GRASSER : " Le colonel Driant est dans le bois. Il visite ses postes. A minuit, il est à la grand'garde n°2. Il félicite le lieutenant Robin pour sa belle conduite, puis lui explique la situation. Elle n'est pas brillante, cette situation. Les chasseurs sont en flèche, sérieusement menacés de front et sur leurs deux flancs. Les Allemands ont des effectifs énormes.
- Mais alors, demande Robin, qu'est-ce que je fais là, avec mes 80 hommes ?
Le colonel le regarde longuement, comme s'il voulait peser son âme et savoir s'il pouvait tout dire à un si jeune officier. Puis : - Mon pauvre Robin, la consigne est de rester là… Robin a compris. Il s'incline… "

A la lisière du même bois, les survivants de la 7e compagnie, aux ordres du capitaine Seguin, repoussent successivement 4 assauts.
La nuit tombe sous la neige et les combats désespérés se poursuivent. Le bombardement qui déchaîne à présent les secondes lignes empêche tout renfort de porter secours.

Les pertes françaises de la journée ont été cruelles, les hommes du 30e corps se sont battus non à 1 contre 3, mais à 1 contre 10 et parfois à 1 contre 20.


Front au 21 février 1916

22 février - Durant la nuit, tout le terrain perdu la veille est méthodiquement occupé par les fantassins allemands..
A 4 h 40, le bombardement allemands. reprend de l'intensité. Au bois des Caures, il est très violent toute la matinée. Les chasseurs de Driant, en entendant les points de départ des obus, savent qu'ils sont lancés de 3 directions à la fois, signifiant que le bois est pratiquement encerclé. La seule issus désormais et de se replier par le bois de Fays et le village de Beaumont. Mais cette retraite n'est pas encore envisagée.
A 12 h, lorsque le bombardement cesse enfin, tous les Chasseur de Driant se relèvent, prêt à en découdre avec l'ennemi, préférant mourir plutôt que de se rendre.
A 12 h 10, c'est l'assaut allemand. Rapidement, le combat devient très violent, les balles sifflent et les grenades explosent. Cependant, les forces sont inégales, et alors que le nombre d'ennemi ne cesse d'augmenter, les rangs français s'éclaircissent inexorablement.

En début d'après-midi, le lieutenant Robin et ses hommes sont fait prisonniers. Ils se sont battu jusqu'aux limites de leurs forces.
Peu à peu, toutes les positions françaises aux bois des Caures sont tournées et perdues.
A 16 h, Driant est contraint à contre cœur d'ordonner la retraite, afin de poursuivre la lutte plus efficacement en arrière. Une balle l'atteint mortellement durant cette manœuvre.

 

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Le commandant Raynal :

Sylvain Eugème Raynal est né à Bordeaux (Gironde) le 7 mars 1867.
Au début de la guerre, il commande le 7e régiment de tirailleurs algériens.
En septembre, il est blessé légèrement à l'épaule par une balle de mitrailleuse. En décembre, il est blessé grièvement par un éclat d'obus et hospitalisé durant 10 mois.
Il retourne au front le 1er octobre 1915, mais quelques jours plus tard, il est blessé de nouveau par un éclat d'obus à la jambe. Cette troisième blessure lui vaut d'être promu officier de la légion d'honneur. Dés lors, la guerre semble terminée pour lui.
Au début de l'année 1916, la France est en manque d'officiers. Le ministère de la guerre annonce que les officiers ne pouvant plus servir en première ligne, de part leur blessure, peuvent se porter volontaires pour commander une forteresse.
Raynal, juste remis de sa blessure et boitant encore fortement, saute sur l'occasion et demande à servir dans le secteur de Verdun, ou l'offensive allemande vient de commencer.
Il est affecté au 96e R.I. et prend le commandement du fort de Vaux le 24 mai.

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Du 1er juin au 7 juin - Siège du fort de Vaux

(voir le thème " Le fort de Vaux ")

 

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Le lieutenant Dupuy :

Kléber Dupuy est né le 28 juin 1882 à La Teste de Buch (Gironde) d'une famille d'ostréiculteurs.
Il débute sa scolarité à l'école de la Mairie et gagne le prix cantonal au certificat d'étude en 1904. Il suit ensuite le Cours Complémentaire qui s'est créé la même année et réussi son brevet en 1908. Il entre ensuite à l'Ecole Normale d'Instituteurs de la Gironde qu'il obtient en 1912. Il trouve alors une place d'instituteur à Le Teich, un village non loin de La Teste de Buch. Il joue ailier droit dans l'équipe de rugby de l'Union Sportive Testerine ou il est champion de la Cête d' Argent en 1913.

Le 1er octobre 1913, il est appelé pour faire son service militaire et il intègre le 9e R.I.
Il devient caporal le 5 juillet 1914.
Dés le début de la guerre, il participe aux combats, notamment à la bataille de la Marne ou il est blessé le 7 septembre 1914, " violente commotion par explosion d'obus de gros calibre ".
Le 24 décembre 1914, il devient aspirant. Le 19 février 1915, il est muté au 7e R.I. et devient sous-lieutenant à titre temporaire le 30 avril 1915.

Le 3 juin 1916, le 7e R.I. est mis sous les ordres du général Mangin et rejoint Verdun. Devenu lieutenant, Kléber Dupuy commande la 3e compagnie. Il monte en ligne le 11 juillet et défend victorieusement le fort de Souville, coupant définitivement la progression allemande sur Verdun.
Le 24 mai 1917, il est fait Chevalier de la Légion d'Honneur.
Le 31 mai 1918, après avoir été grièvement blessé et amputé d'une jambe, il est promu Officier de la Légion d'Honneur.
Le 25 septembre 1918, il devient capitaine.
Démobilisé le 30 décembre 1919, il est titulaire de la Croix de Guerre 14/18 avec 5 citations dont 4 à l'ordre de l'Armée.

De retour à la vie civile, il reprend son métier d'instituteur à Bordeaux, mais n'ayant plus qu'une seul jambe, la station debout lui est très pénible. Il passe finalement le concours de Chef de Service Administratif du Comité Départemental d'Assistance aux Mutilés et Veuves de Guerre de la Gironde ou il est reçu ,classé N° 1, le 1er septembre 1923.
Il dirige cet Office des Anciens Combattants jusqu'à sa retraite en 1957.
Le 20 avril 1946, il est fait grand officier de la Légion d'Honneur au titre de la résistance.
Il décède à Talence le 16 octobre 1966 et inhumé dans le caveau familiale à La Teste de Buch.
Une rue de La Teste de Bush ainsi qu'une rue de Bordeaux portent son nom.

Le 13 juillet 1969, une stèle est inaugurée sur le champ de bataille de Verdun, à Souville, en présence du Docteur Louis Conte, de l'Adjudant Guisnier et du Sergent Major Gaston Comte qui était avec lui les 11 et 12 juillet 1916 lors de la défendre victorieusement du Fort de Souville. On peut y lire, en particulier, gravé dans le marbre : " GLOIRE AU LIEUTENANT KLEBER DUPUY ET A SES SOLDATS DE LA 3e CIE DU 7e R.I. ".
Le drapeau de la 3° Cie a été remis au Mémorial de Verdun par son épouse Renée Kléber Dupuy. Le manuscrit original du tableau d'honneur de la 3e Cie, pendant la guerre de 14/18 (302 citations ) a été remis au Mémorial de Verdun par son neveu Jean-Louis Dupuy. Lui même a remis les médailles de Kléber Dupuy à la ville de La Teste de Buch le 11 novembre 1992.

Enfin, la dernière apparition publique de Kléber Dupuy a été décrite par l'historien Louis Cadars : " Ce fut le 19 avril 1964, une minute intense d'émotion lorsque les douze cent assistants virent s'avancer sur sa chaise roulante de grand invalide, un homme resté droit et stoïque à l'inoubliable regard de flamme : le capitaine Kléber DUPUY, grand Officier de la Légion d'Honneur. D'un seul mouvement toute la salle qui comprenait de grands chefs de 14/18 , de très nombreux officiers supérieurs... fut debout pour honorer le héros qui s'avançait vers nous. Et ce fut un impressionnant garde à vous pendant que résonnait la sonnerie militaire et que se confrontaient ainsi en une pathétique minute, la gloire des grands chefs et le symbole vivant de l'héroïsme le plus pur et du sacrifice incarnés dans la présence vivante du Capitaine Kléber DUPUY "

(Un grand merci à Jean-Louis Dupuy, neveu de capitaine Kléber Dupuy, pour toutes ces informations)


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11 et 12 juillet - Défense du fort de Souville et arrêt définitif de la progression allemande sur Verdun

(voir dans la partie " Fortifications ", " Le fort de Souville ")

 

 

La suite est en construction...